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CATÉCHISME DU CURÉ.

dans votre paroisse. Dites-moi, je vous prie, comment vous en userez dans la confession.

TÉOTIME.

La confession est une chose excellente, un frein aux crimes, inventé dans l’antiquité la plus reculée ; on se confessait dans la célébration de tous les anciens mystères ; nous avons imité et sanctifié cette sage pratique : elle est très-bonne pour engager les cœurs ulcérés de haine à pardonner, et pour faire rendre par les petits voleurs ce qu’ils peuvent avoir dérobé à leur prochain. Elle a quelques inconvénients. Il y a beaucoup de confesseurs indiscrets, surtout parmi les moines, qui apprennent quelquefois plus de sottises aux filles que tous les garçons d’un village ne pourraient leur en faire. Point de détails dans la confession ; ce n’est point un interrogatoire juridique, c’est l’aveu de ses fautes qu’un pécheur fait à l’Être suprême entre les mains d’un autre pécheur qui va s’accuser à son tour. Cet aveu salutaire n’est point fait pour contenter la curiosité d’un homme.

ARISTON.

Et des excommunications, en userez-vous ?

TÉOTIME.

Non ; il y a des rituels où l’on excommunie les sauterelles, les sorciers, et les comédiens. Je n’interdirai point l’entrée de l’église aux sauterelles, attendu qu’elles n’y vont jamais. Je n’excommunierai point les sorciers, parce qu’il n’y a point de sorciers ; et à l’égard des comédiens, comme ils sont pensionnés par le roi, et autorisés par le magistrat, je me garderai bien de les diifamer. Je vous avouerai même, comme à mon ami, que j’ai du goût pour la comédie quand elle ne choque point les mœurs. J’aime passionnément le Misanthrope, et toutes les tragédies où il y a des mœurs. Le seigneur de mon village fait jouer dans son château quelques-unes de ces pièces, par de jeunes personnes qui ont du talent : ces représentations inspirent la vertu par l’attrait du plaisir ; elles forment le goût, elles apprennent à bien parler et à bien prononcer. Je ne vois rien là que de très-innocent, et même de très-utile ; je compte bien assister quelquefois à ces spectacles pour mon instruction , mais dans une loge grillée, pour ne point scandaliser les faibles.

ARISTON.

Plus vous me découvrez vos sentiments, et plus j’ai envie de devenir votre paroissien. Il y a un point bien important qui m’embarrasse. Comment ferez-vous pour empêcher les paysans de s’enivrer les jours de fêtes ? c’est là leur grande manière de les