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FERRARE.


FERMETÉ[1].


Fermeté vient de ferme, et signifie autre chose que solidité et dureté : une toile serrée, un sable battu, ont de la fermeté sans être durs ni solides.

Il faut toujours se souvenir que les modifications de l’âme ne peuvent s’exprimer que par des images physiques : on dit la fermeté de l’âme, de l’esprit ; ce qui ne signifie pas plus solidité ou dureté qu’au propre.

La fermeté est l’exercice du courage de l’esprit ; elle suppose une résolution éclairée : l’opiniâtreté au contraire suppose de l’aveuglement.

Ceux qui ont loué la fermeté du style de Tacite n’ont pas tant de tort que le prétend le P. Bouhours : c’est un terme hasardé, mais placé, qui exprime l’énergie et la force des pensées et du style.

On peut dire que La Bruyère a un style ferme, et que d’autres écrivains n’ont qu’un style dur.


FERRARE[2].


Ce que nous avons à dire ici de Ferrare n’a aucun rapport à la littérature, principal objet de nos questions ; mais il en a un très-grand avec la justice, qui est plus nécessaire que les belles-lettres, et bien moins cultivée, surtout en Italie.

[3] Ferrare était constamment un fief de l’empire, ainsi que Parme et Plaisance. Le pape Clément VIII en dépouilla César d’Este à main armée, en 1597. Le prétexte de cette tyrannie était bien singulier pour un homme qui se dit l’humble vicaire de Jésus-Christ.

Le duc Alfonse d’Este, premier du nom, souverain de Ferrare, de Modène, d’Este, de Carpi, de Rovigno, avait épousé une simple citoyenne de Ferrare, nommée Laura Eustochia, dont il avait eu trois enfants avant son mariage, reconnus par lui solennellement

  1. Encyclopédie, tome VI, 1756. (B.)
  2. Questions sur l’ Encyclopédie, sixième partie, 1771, (B.)
  3. Plusieurs des alinéas suivants faisaient déjà, en 1768, partie de l’opuscule intitulé les Droits des hommes, etc. (voyez les Mélanges, année 1768).