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ŒDIPE.
Le Grand-Prêtre.

Fatal présent du ciel ! Science malheureuse !
Qu’aux mortels curieux vous êtes dangereuse !
Plût aux cruels destins qui pour moi sont ouverts,
Que d’un voile éternel mes yeux fussent couverts !

Philoctète.

Eh bien ! Que venez-vous annoncer de sinistre ?

Œdipe.

D’une haine éternelle êtes-vous le ministre ?

Philoctète.

Ne craignez rien.

Œdipe.

Ne craignez rien.Les dieux veulent-ils mon trépas ?

Le Grand-Prêtre, à Œdipe.

Ah ! Si vous m’en croyez, ne m’interrogez pas.

Œdipe.

Quel que soit le destin que le ciel nous annonce,
Le salut des Thébains dépend de sa réponse.

Philoctète.

Parlez.

Œdipe.

Parlez.Ayez pitié de tant de malheureux ;
Songez qu’Œdipe…

Le Grand-Prêtre.

Songez qu’Œdipe…Œdipe est plus à plaindre qu’eux.

Premier personnage du chœur.

Œdipe a pour son peuple une amour paternelle ;
Nous joignons à sa voix notre plainte éternelle.
Vous à qui le ciel parle, entendez nos clameurs.

Deuxième personnage du chœur.

Nous mourons, sauvez-nous, détournez ses fureurs ;
Nommez cet assassin, ce monstre, ce perfide.

Premier personnage du chœur.

Nos bras vont dans son sang laver son parricide.

Le Grand-Prêtre.

Peuples infortunés, que me demandez-vous ?

Premier personnage du chœur.

Dites un mot, il meurt, et vous nous sauvez tous.

Le Grand-Prêtre.

Quand vous serez instruits du destin qui l’accable,
Vous frémirez d’horreur au seul nom du coupable.
Le dieu qui par ma voix vous parle en ce moment