Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome2.djvu/214

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Le destin m'a frappé de ses plus rudes coups,
Et, pour comble d'horreur, je les mérite tous.

IDAMAS.

Seigneur, m'est-il permis de parler sans contrainte ?
Ce trône auguste et saint, qu'environne la crainte,
Serait mieux affermi s'il l'était par l'amour :
En faisant des heureux, un roi l'est à son tour.
À d'éternels chagrins votre âme abandonnée
Pourrait tarir d'un mot leur source empoisonnée.
Seigneur, ne souffrez plus que d'indignes discours
Osent troubler la paix et l'honneur de vos jours,
Ni que de vils flatteurs écartent de leur maître
Des coeurs infortunés, qui vous cherchaient peut-être.
Bientôt de vos vertus tout Israël charmé..

HÉRODE.

Eh ! croyez-vous encor que je puisse être aimé ?
Qu'Hérode est aujourd'hui différent de lui-même !

MAZAEL.

Tout adore à l'envi votre grandeur suprême.

IDAMAS.

Un seul coeur vous résiste, et l'on peut le gagner.

HÉRODE.

Non ; je suis un barbare, indigne de régner.

IDAMAS.

Votre douleur est juste ; et si pour Mariamne...

HÉRODE.

Et c'est ce nom fatal, hélas ! qui me condamne ;
C'est ce nom qui reproche à mon coeur agité
L'excès de ma faiblesse et de mn cruauté

MAZAEL.

Elle sera toujours inflexible en sa haine :
Elle fuit votre vue.

HÉRODE.

Ah ! j'ai cherché la sienne.

MAZAEL.

Qui ? vous, seigneur ?

HÉRODE.

Eh quoi ! Mes transports furieux,
Ces pleurs que mes remords arrachent de mes yeux,
Ce changement soudain, cette douleur mortelle,
Tout ne te dit-il pas que je viens d'auprès d'elle ?
Toujours troublé, toujours plein de haine et d'amour,