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NEWTON ET DESCARTES.
sélim.

Il y a des gens qui le savent, mais ce n’est pas moi. Tout ce que je sais bien c’est que l’Alcoran est ridicule, quoique de temps en temps il y ait de bonnes choses. Certainement l’Alcoran n’était point nécessaire à l’homme ; je m’en tiens là : je vois clairement ce qui est faux, et je connais très-peu ce qui est vrai.

osmin.

Je croyais que vous m’instruiriez, et vous ne m’apprenez rien.

sélim.

N’est-ce pas beaucoup de connaître les gens qui vous trompent, et les erreurs grossières et dangereuses qu’ils vous débitent ?

osmin.

J’aurais à me plaindre d’un médecin qui me ferait une exposition des plantes nuisibles, et qui ne m’en montrerait pas une salutaire.

sélim.

Je ne suis point médecin, et vous n’êtes point malade ; mais il me semble que je vous donnerais une fort bonne recette si je vous disais : Défiez-vous de toutes les inventions des charlatans, adorez Dieu, soyez honnête homme, et croyez que deux et deux font quatre.



NEWTON  ET  DESCARTES.
SECTION PREMIÈRE[1].
SECTION II[2].

Newton fut d’abord destiné à l’Église. Il commença par être théologien, et il lui en resta des marques toute sa vie. Il prit sérieusement le parti d’Arius contre Athanase ; il alla même un peu plus loin qu’Arius, ainsi que tous les sociniens. Il y a aujourd’hui en Europe beaucoup de savants de cette opinion ; je ne dirai pas de cette communion, car ils ne font point de corps ; ils sont même partagés, et plusieurs d’entre eux réduisent leur système au pur déisme, accommodé avec la morale du Christ. Newton n’était pas de ces derniers ; il ne différait de l’Église anglicane que sur le point de la consubstantialité, et il croyait tout le reste.

  1. Les éditeurs de Kehl avaient formé la première section de cet article de la quatorzième des Lettres philosophiques. Voyez les Mélanges, année 1734. (B.)
  2. Ce morceau était dans la troisième partie des Mélanges, 1756. Peut-être est-il plus ancien. (B.)