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PRÉPUCE.

l’impie, et vous effrayent ; votre derviche, craignant de voir diminuer son revenu, vous accuse auprès du cadi, et ce cadi vous fait empaler s’il le peut, parce qu’il veut commander à des sots, et qu’il croit que les sots obéissent mieux que les autres ; et cela durera jusqu’à ce que vos voisins, et le derviche, et le cadi, commencent à comprendre que la sottise n’est bonne à rien, et que la persécution est abominable.



PRÉPUCE[1].


Il est toujours question de prépuce dans le livre des Juifs. Le passage le plus embarrassant, touchant le prépuce, est celui du premier chapitre des Machabées. L’auteur parle de plusieurs Juifs qui demandèrent permission au roi Antiochus de vivre à la grecque, permission qu’on leur accorda très-facilement. Ils étaient honteux, dans les bains publics et dans les exercices où il fallait paraître nus, de montrer aux Grecs les marques de leur circoncision. Le texte dit qu’ils se firent des prépuces, et qu’ils violèrent le saint Testament. Fecerunt sibi præputia, et recesserunt a Testamento sancto.

Comment se fait-on un prépuce ? il ne revient point comme les ongles. Cela n’est à la vérité qu’un très-petit bord du capuchon du gland qu’on a coupé ; mais ce bout de chair ne renaît pas plus que le bout du nez.

Les rabbins ont prétendu qu’il y a une manière de faire rétablir ce prépuce ; mais ils ont raisonné en rabbins. En vain le médecin Bartholin a voulu soutenir cette opinion ridicule. Il y a seulement une manière assez aisée de déguiser un peu l’amputation du prépuce : c’est de le lier un peu par le bout avec un fil, quand la verge n’est pas dans son intumescence ; mais un tel palliatif ne pourrait se prolonger longtemps. Au reste on coupe si peu de chair aux Hébreux et aux musulmans, qu’il faut de bons yeux pour s’apercevoir de ce qui manque.

On n’a pas eu moins de peine à expliquer un passage de Jérémie assez singulier :

« Je visiterai quiconque a le prépuce coupé, l’Égypte, Juda, Édom, les enfants d’Ammon et de Moab, et tous ceux qui ont les cheveux courts et qui habitent le désert, car toutes ces nations

  1. J’ai publié cet article en 1821, d’après l’original écrit de la main de Wagnière, secrétaire de Voltaire ; mais cet article avait déjà été imprimé, trois ans auparavant, dans le tome XXVI de l’édition en quarante-deux volumes. (B.)