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PROPHÉTIES.
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ou de ses proches. Ils s’appelaient mages dans leur langue, parce qu’ils servaient Dieu dans le silence et à voix basse.

Ces mages allaient donc tous les ans, après la récolte des blés, sur une montagne qui est dans leur pays, qu’ils nomment le mont de la Victoire, et qui est très-agréable, à cause des fontaines qui l’arrosent et des arbres qui le couvrent. Il y a aussi un antre creusé dans le roc, et c’est là qu’après s’être lavés et purifiés, ils offraient des sacrifices, et priaient Dieu en silence pendant trois jours.

Ils n’avaient point discontinué cette pieuse pratique depuis un grand nombre de générations, lorsqu’enfin l’heureuse étoile vint descendre sur leur montagne. On voyait en elle la figure d’un petit enfant, sur lequel il y avait celle d’une croix. Elle leur parla, et leur dit d’aller en Judée. Ils partirent à l’instant, l’étoile marchant toujours devant eux, et ils furent deux années en chemin.

Cette prophétie du livre de Seth ressemble à celle de Zorodascht ou Zoroastre, excepté que la figure que l’on devait voir dans l’étoile était celle d’une jeune fille vierge ; aussi Zoroastre ne dit pas qu’elle aurait une croix sur elle. Cette prophétie, citée dans l’Évangile de l’enfance[1], est rapportée ainsi par Abulpharage[2] : Zoroastre, le maître des Maguséens, instruisit les Perses de la manifestation future de notre Seigneur Jésus-Christ, et leur commanda de lui offrir des présents lorsqu’il serait né. Il les avertit que dans les derniers temps une vierge concevrait sans l’opération d’aucun homme ; et que lorsqu’elle mettrait au monde son fils, il apparaîtrait une étoile qui luirait en plein jour, au milieu de laquelle ils verraient la figure d’une jeune fille vierge. Ce sera vous, mes enfants, ajouta Zoroastre, qui l’apercevrez avant toutes les nations. Lors donc que vous verrez paraître cette étoile, allez où elle vous conduira. Adorez cet enfant naissant ; offrez-lui vos présents : car c’est le Verbe qui a créé le ciel.

L’accomplissement de cette prophétie est rapporté, dans l’Histoire naturelle de Pline[3] ; mais outre que l’apparition de l’étoile aurait précédé la naissance de Jésus d’environ quarante ans, ce passage semble fort suspect aux savants ; et ce ne serait pas le premier ni le seul qui aurait été interpolé en faveur du christia-

  1. Article 7. (Note de Voltaire.)
  2. Dinast., page 82. (Id.)
  3. Livre II, chapitre xxv. (Id.)