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ROI.

croire, et sûrement il en est davantage qui sont mortes de chagrin.

Les vapeurs violentes qui excitent tantôt les larmes, tantôt les symptômes du rire, tirent à la vérité les muscles de la bouche ; mais ce n’est point un ris véritable, c’est une convulsion, c’est un tourment. Les larmes peuvent alors être vraies, parce qu’on souffre ; mais le rire ne l’est pas ; il faut lui donner un autre nom, aussi l’appelle-t-on rire sardonien.

Le ris malin, le perfidum ridens, est autre chose : c’est la joie de l’humiliation d’autrui ; on poursuit par des éclats moqueurs, par le cachinnum (terme qui nous manque), celui qui nous a promis des merveilles et qui ne fait que des sottises : c’est huer plutôt que rire. Notre orgueil alors se moque de l’orgueil de celui qui s’en est fait accroire. On hue notre ami Fréron dans l’Écossaise plus encore qu’on n’en rit ; j’aime toujours à parler de l’ami Fréron : cela me fait rire.



ROCHESTER ET WALLER[1].




ROI[2].


« Roi, basileus, tyrannos, rex, dux, imperator, melch, baal, bel, pharao, éli, shadai, adoni, shak, sophi, padisha, bogdan, chazan, kan, krall, king, kong, kœnig, » etc., etc., toutes expressions qui semblent signifier la même chose, et qui expriment des idées toutes différentes.

Dans la Grèce, ni basileus, ni tyrannos ne donna jamais l’idée du pouvoir absolu. Saisit ce pouvoir qui put ; mais ce n’est que malgré soi qu’on le laissa prendre.

Il est clair que chez les Romains les rois ne furent point despotiques. Le dernier Tarquin mérita d’être chassé, et le fut. Nous n’avons aucune preuve que les petits chefs de l’Italie aient jamais pu faire à leur gré présent d’un lacet au premier homme de l’État, comme fait aujourd’hui un Turc imbécile dans son sérail, et comme de vils esclaves barbares beaucoup plus imbéciles le souffrent sans murmurer.

  1. Dans l’édition de Kehl, cet article se composait de la vingt et unième des Lettres philosophiques. (B.) — Voyez les Mélanges, année 1734.
  2. Questions sur l’Encyclopédie, huitième partie, 1771. (B.)