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MESSE.

avait commencé de messes : mais pour toutes il ne récitait qu’une fois le canon, et à la fin il ajoutait autant de collectes qu’il avait réuni de messes[1].

Ce ne fut que vers la fin du ive siècle que le mot de messe commença à signifier la célébration de l’eucharistie. Le savant Beatus Rhenanus, dans ses notes sur Tertullien[2], observe que saint Ambroise consacra cette expression du peuple prise de ce qu’on mettait dehors les catéchumènes après la lecture de l’Évangile.

On trouve dans les Constitutions apostoliques[3] une liturgie sous le nom de saint Jacques, par laquelle il paraît qu’au lieu d’invoquer les saints au canon de la messe, la primitive Église priait pour eux. Nous vous offrons encore, Seigneur, disait le célébrant, ce pain et ce calice pour tous les saints qui vous ont été agréables depuis le commencement des siècles, pour les patriarches, les prophètes, les justes, les apôtres, les martyrs, les confesseurs, les évêques, les prêtres, les diacres, les sous-diacres, les lecteurs, les chantres, les vierges, les veuves, les laïques, et tous ceux dont les noms vous sont connus. Mais saint Cyrille de Jérusalem, qui vivait dans le ive siècle, y substitue cette explication : Après cela, dit-il[4], nous faisons commémoration de ceux qui sont morts avant nous, et premièrement des patriarches, des apôtres, des martyrs, afin que Dieu reçoive nos prières par leur intercession. Cela prouve, comme nous le dirons à l’article Reliques, que le culte des saints commençait alors à s’introduire dans l’Église.

Noël Alexandre[5] cite des Actes de saint André, où l’on fait dire à cet apôtre : J’immole tous les jours sur l’autel du seul vrai Dieu, non les chairs des taureaux, ni le sang des boucs, mais l’agneau immaculé, qui demeure toujours entier et vivant après qu’il est sacrifié et que tout le peuple fidèle en a mangé la chair ; mais ce savant dominicain avoue que cette pièce n’est connue que depuis le viiie siècle. Le premier qui l’ait citée est Étherius, évêque d’Osma en Espagne, qui écrivit contre Élipand en 788.

Abdias[6] rapporte que saint Jean, averti par le Seigneur de la fin de sa course, se prépara à la mort et recommanda son Église à Dieu. Puis, ayant pris du pain qu’il se fit apporter, il leva les yeux au ciel, le bénit, le rompit, et le distribua à tous ceux qui

  1. Bingham, Origin. eccles., tome VI, livre XV, chapitre iv, article v. (Note de Voltaire.)
  2. Livre IV, contre Marcion. (Id.)
  3. Livre VIII, chapitre xii. (Id.)
  4. Cinquième catéchèse. (Note de Voltaire.)
  5. Siècle Ier, page 109. (Id.)
  6. Hist. apostolique, livre V, art. xvii et xviii. (Id.)