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MESSIE.

qui le conduit au plus haut point de gloire, de puissance et de félicité, c’est-à-dire au rang de la première des créatures ?

Tous les chrétiens s’accordent à trouver ces caractères, en apparence si incompatibles, dans la personne de Jésus de Nazareth, qu’ils appellent le Christ ; ses sectateurs lui donnaient ce titre par excellence, non qu’il eût été oint d’une manière sensible et matérielle, comme l’ont été anciennement quelques rois, quelques prophètes et quelques sacrificateurs, mais parce que l’esprit divin l’avait désigné pour ces grands offices, et qu’il avait reçu l’onction spirituelle nécessaire pour cela.

(A[1]) Nous en étions là sur un article aussi important, lorsqu’un prédicateur hollandais, plus célèbre par cette découverte que par les médiocres productions d’un génie d’ailleurs faible et peu instruit, nous a fait voir que notre Seigneur Jésus était le Christ, le Messie de Dieu, ayant été oint dans les trois plus grandes époques de sa vie pour être notre roi, notre prophète, et notre sacrificateur.

Lors de son baptême, la voix du souverain maître de la nature le déclare son fils, son unique, son bien-aimé, et par là même son représentant.

Sur le Thabor, transfiguré, associé à Moïse et à Élie, cette même voix surnaturelle l’annonce à l’humanité comme le fils de celui qui anime et envoie les prophètes, et qui doit être écouté par préférence.

Dans Gethsémané, un ange descend du ciel pour le soutenir dans les angoisses extrêmes où le réduit l’approche de son supplice ; il le fortifie contre les frayeurs cruelles d’une mort qu’il ne peut éviter, et le met en état d’être un sacrificateur d’autant plus excellent qu’il est lui-même la victime innocente et pure qu’il va offrir.

Le judicieux prédicateur hollandais, disciple de l’illustre Coccéius, trouve l’huile sacramentale de ces diverses onctions célestes dans les signes visibles que la puissance de Dieu fit pa-

  1. On supprima dans les Dictionnaires (depuis A jusqu’à B) tout ce paragraphe concernant le prédicateur hollandais, parce qu’on le crut hors d’œuvre. (Note de Voltaire.) — Cette note existe telle qu’on la lit ici dans la première édition des Questions sur l’Encyclopédie. Le morceau auquel elle se rapporte (c’est-à-dire les six alinéas qui suivent) ne se trouve en effet ni dans les premières éditions du Dictionnaire philosophique, ni dans la Raison par alphabet, ni dans l’Encyclopédie, qui sont les ouvrages désignés ici par le mot Dictionnaires, et dans lesquels la suppression est plus longue que ne l’indique Voltaire, car on n’y trouve pas non plus les deux alinéas qui précèdent, commençant par : « Comment en effet concevoir, » et « Tous les chrétiens, etc. » (B.)