Grandes-Indes et au Brésil, de donner aux Chinois d’autres figures qu’à nous, de mettre des corps de Lapons tout auprès des Suédois.
Voici enfin une nouvelle richesse de la nature, une espèce qui ne ressemble pas tant à la nôtre que les barbets aux lévriers. Il y a encore probablement quelque autre espèce vers les terres australes. Voilà le genre humain plus favorisé qu’on n’a cru d’abord : il eût été bien triste qu’il y eût tant d’espèces de singes, et une seule d’hommes. C’est seulement grand dommage qu’un aimal aussi parfait soit si peu diversifié, et que nous ne comptions encore que cinq ou six espèces absolument différentes, tandis qu’il y a parmi les chiens une diversité si belle. Il est très-vraisemblable qu’il s’est détruit quelques-unes de ces espèces d’animaux à deux pieds sans plumes, comme il s’est perdu évidemment beaucoup d’autres espèces d’animaux ; celle-ci, que nous appelons Maures blancs, est très-peu nombreuse ; il ne faudrait presque rien pour l’anéantir ; et, pour peu que nous continuions en Europe à peupler les couvents, et à dépeupler la terre pour savoir qui la gouvernera, je ne donne pas encore beaucoup de siècles à notre pauvre espèce.
On m’assure que la race de ces petits Maures blancs est fort fière, et qu’elle se croit privilégiée du ciel ; qu’elle a une sainte horreur pour les hommes qui sont assez malheureux pour avoir des cheveux ou de la laine noire, pour ne point loucher, pour avoir les oreilles courtes. Ils disent que tout l’univers a été créé pour les Maures blancs ; que depuis il leur est arrivé quelques petits malheurs, mais que tout doit être réparé, et qu’ils seront les maîtres des nègres et des autres blancs, gens réprouvés du ciel à jamais. Peut-être qu’ils se trompent ; mais si nous pensons valoir beaucoup mieux qu’eux, nous nous trompons assez lourdement[1].
- ↑ Tout le monde connaît aujourd’hui les Albinos, et il ne viendra à l’idée de personne de leur contester l’égalité, sous tous les rapports, avec nous. On sait que la couleur de leurs cheveux, celle de l’iris de leur œil, tiennent à l’absence d’une matière colorante qu’on possède habituellement. L’iris étant alors transparent, on voit le fond de l’œil : d’où la couleur rose. (D.)