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MÉMOIRE DU SIEUR DE VOLTAIRE.

deux éditions de la Henriade ; mais comme cet ouvrage avait toujours un air de traduction, un air étranger, l’auteur le refondit entièrement, et le donna ensuite sous son propre nom[1] : voilà ce qui aigrit le traducteur, voilà peut-être la source de toute la haine ; il l’osa même reprocher un jour à M.  de Voltaire ; il ne put lui pardonner d’avoir usé de son bien. Mais aujourd’hui qu’ose-t-il dire dans son livre ? que sa traduction imprimée chez Chaubert, et qui fourmille de fautes, n’est pas de lui, mais de feu M.  le comte de Plélo. Pouvez-vous ainsi insulter à la mémoire d’un homme aussi cher à la France ? Qui l’eût cru qu’un ambassadeur qui a versé son sang pour la patrie dût être avec vous en compromis ? Quoi ! pendant six années entières vous avouez cette traduction, vous recevez les éloges que M.  de Voltaire (votre bienfaiteur en tout) a donnés à votre ouvrage, corrigé de sa main ! et lorsque enfin la vérité éclate, ce n’est plus vous qui avez fait cette traduction, c’est un mort qui ne peut vous contredire !

Serait-ce encore le comte de Plélo qui serait l’auteur d’un libelle clandestin[2] fait contre le sieur de Voltaire dans le temps des représentations d’Alzire ? Serait-ce lui qui aurait fait toutes ces brochures dont on est inondé depuis si longtemps, ces Lettres à un comédien[3], ces Réceptions à l’Académie[4], ces Pantalons[5], ces Rats calotins[6], tous ces petits recueils des plus basses satires, dont l’auteur est si connu ?

Pour mieux confondre toutes ces satires, toutes ces accusations que le sieur Desfontaines a semées, et qu’il voudrait répandre dans toute l’Europe savante contre le sieur de Voltaire, nous ne voulons ici que mettre sous les yeux du lecteur, en peu de mots, qui sont ceux que cet écrivain a outragés, et comment il les outrage : ne parlons que des libelles mêmes qu’il avoue, et ne citons que des faits positifs.

M.  l’abbé de Houteville fait-il un livre[7] éloquent et estimé sur

  1. Il est au tome VIII de la présente édition.
  2. Je n’ai pu découvrir ce libelle clandestin, que Voltaire attribue à Desfontaines. (B.)
  3. Desfontaines est auteur des Lettres d’un comédien français au sujet de l’Histoire du théâtre italien, écrite par M. Riccoboni, dit Lélio, 1728, in-12.
  4. À la suite de la troisième édition du Dictionnaire néologique (et des suivantes), on trouve la Réception de l’illustre messire Christophe Mathanasius.
  5. L’Éloge historique de Pantalon Phœbus (Lamotte) est imprimé à la suite du Dictionnaire néologique.
  6. Deux Lettres d’un rat calotin à citron Barbet (contre Moncrif), 1720, in-12, sont aussi réimprimées à la suite du Dictionnaire néologique.
  7. La Vérité de la religion chrétienne. Voltaire n’a pas toujours parlé aussi favorablement de cet ouvrage ; voyez t. XX, p. 416 et 437 ; XXI, p. 505.