mettre sur le compte d’un homme d’État un tel fatras d’erreurs et de contradictions ? L’Angleterre, dont il parle, avait déjà des pays immenses dans l’Amérique. Quant à Drake et à Thomas Cavendish, leurs exemples sont cités très-mal à propos : ils ne furent pas envoyés pour faire des établissements, mais pour ruiner ceux des Espagnols, pour troubler leur commerce, pour faire des prises ; et c’est à quoi ils réussirent.
XIX. Si on voulait se donner la peine de lire le Testament politique avec attention, on serait bien surpris devoir qu’en effet ce livre est plutôt une critique de l’administration du cardinal qu’une exposition de sa conduite, et une suite de ses principes : tout y roule sur deux points, dont le premier est indigne de lui, et dont le second est un outrage à sa mémoire.
Le premier objet est un lieu commun, puéril, vague, un catéchisme pour un prince de dix ans, et bien étrangement déplacé à l’égard d’un roi âgé de quarante années ; tels sont ces chapitres : « Que le fondement du bonheur d’un État est le règne de Dieu ; que la raison doit être la règle de la conduite ; que les intérêts publics doivent être préférés aux particuliers ; que la prévoyance est nécessaire ; qu’il faut destiner un chacun à l’emploi qui lui est propre ; qu’il est important d’éloigner les flatteurs, médisants, faiseurs d’intrigues ; » et vingt autres découvertes de cette finesse et de cette profondeur, accompagnées d’avis qui auraient été une insulte à Louis XIII, prince éclairé, et qui eût été en droit de répondre à son ministre, à son serviteur : Parlez ainsi à mon fils, et respectez plus votre maître.
Le second point, qui est surtout renfermé dans le neuvième chapitre, roule sur les projets d’administration imaginés par l’auteur ; et de tous ces projets il n’y en a pas un seul qui ne soit précisément le contre-pied de l’administration du cardinal. L’auteur se met en tête d’abolir les comptants, ou de les réduire par grâce à un million d’or. Les comptants sont des ordonnances secrètes, pour des affaires secrètes, dont on ne rend point compte. C’est le privilége le plus cher de la place d’un premier ministre. Son ennemi seul en pourrait demander l’abolition.
XX. Ce chapitre neuvième du Testament politique porte à chaque page les preuves les plus évidentes de la supposition la plus maladroite : c’est là que tout est faux, réflexions, faits et calculs ; c’est là que l’auteur avance que quand on établit un impôt, on est obligé de donner une plus grande solde au soldat ; ce qui n’est pourtant arrivé ni sous Louis XIII ni sous Louis XIV ; c’est là qu’en soulageant le peuple de dix-sept millions de taille, il porte