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LETTRE

��M. GUBSTORF, PASTEUR DE HELMSTADT

A M. KIRKEF, PASTEUR DE LAUVTORP.

��Du 10 octobre 1700'.

Je gémis comme vous, mon cher confrère, des funestes pro- grès delà philosophie. Les magistrats, les princes pensent : nous sommes perdus, L'Angleterre surtout a corrompu l'Europe par ses malheureuses découvertes sur la lumière, sur la gravitation, sur Taberration des étoiles fixes. Les hommes parviennent insen- siblement à cet excès de témérité de ne rien croire que ce qui est raisonnable, et ils répondent à plusieurs de nos inventions :

Quodcumque ostendis mihi sicincredulus odi.

(HoR., de Atl. poet., 183.)

J"ai réfléchi, dans l'amertume de mon cœur, sur cette haine funeste que tant de personnes de tout rang, de tout âge et de tout sexe, déploient si hautement contre nos semblables; peut-être nos divisions en sont-elles la source; peut-être aussi devons-nous l'attribuer au peu de circonspection de certaines personnes qui ont révolté les esprits au lieu de les gagner. Nous avons insulté les sages, comme les luthériens outragent les calvinistes, comme les calvinistes disent des injures aux anglicans, les anglicans aux puritains, ceux-ci aux primitifs, nommés quakers, tous à l'Église romaine, et l'Église romaine à tous.

1. C'est cette date, mise par l'auteur, qui me fait placer ici cette pièce. Vol- taire a antidaté plusieurs de ses ouvrages. La première édition que je connaisse de la Lettre de Cubstorf est celle qui fait partie du volume intitulé Contes de Guillaume Vadé, 1764, in-S». (B.)

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