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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome24.djvu/452

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SERMON DES CINQUANTE.

Palestine. Voilà votre beau pays, leur dit Dieu ; égorgez tous les habitants, tuez tous les enfants mâles, faites mourir les femmes mariées, réservez pour vous toutes les petites filles. Tout cela est exécuté à la lettre selon les livres hébreux ; et nous frémirions d’horreur à ce récit si le texte n’ajoutait pas que les Juifs trouvèrent dans le camp des Madianites 675,000 brebis, 72,000 bœufs, 61,000 ânes, et 32,000 pucelles. L’absurdité dément heureusement ici la barbarie ; mais, encore une fois, ce n’est pas ici que j’examine le ridicule et l’impossible ; je m’arrête à ce qui est exécrable.

Après avoir passé le Jourdain à pied sec, comme la mer, voilà ce peuple dans la terre promise. La première personne qui introduit par une trahison ce peuple saint est une prostituée nommée Rahab. Dieu se joint à cette prostituée ; il fait tomber les murs de Jéricho au bruit de la trompette ; le saint peuple entre dans cette ville, sur laquelle il n’avait, de son aveu, aucun droit, et il massacre les hommes, les femmes, et les enfants. Passons sous silence les autres carnages, les rois crucifiés, les prétendues guerres contre les géants de Gaza et d’Ascalon, et le meurtre de ceux qui ne pouvaient prononcer le mot Shiboleth.

Écoutons cette belle aventure :

Un lévite arrive sur son âne, avec sa femme, à Gabaa dans la tribu de Benjamin ; quelques Benjamites voulant absolument commettre le péché de Sodome avec le lévite, ils assouvissent leur brutalité sur la femme, qui meurt de cet excès ; il fallait punir les coupables : point du tout. Les onze tribus massacrent toute la tribu de Benjamin ; il n’en échappe que six cents hommes ; mais les onze tribus sont enfin fâchées de voir périr une des douze, et, pour y remédier, ils exterminent les habitants d’une de leurs propres villes pour y prendre six cents filles qu’ils donnent aux six cents Benjamites survivants pour perpétuer cette belle race.

Que de crimes commis au nom du Seigneur ! ne rapportons que celui de l’homme de Dieu, Aod. Les Juifs, venus de si loin pour conquérir, sont soumis aux Philistins ; malgré le Seigneur, ils ont juré obéissance au roi Églon : un saint juif, c’est Aod, demande à parler tête à tête avec le roi de la part de Dieu. Le roi ne manque pas d’accorder l’audience ; Aod l’assassine, et c’est de cet exemple qu’on s’est servi tant de fois chez les chrétiens pour trahir, pour perdre, pour massacrer tant de souverains.

Enfin la nation chérie, qui avait été ainsi gouvernée par Dieu même, veut avoir un roi ; de quoi le prêtre Samuel est bien fâché.