Les premiers apôtres ont été expressément envoyés pour chasser les diables : on défend les diables ; les apôtres se faisaient apporter l’argent des prosélytes : celui qui est convaincu de prendre ainsi de l’argent est puni ; ils disaient qu’il vaut mieux obéir à Dieu qu’aux hommes[1], et sur ce prétexte ils bravaient les lois : le gouvernement maintient que suivre les lois c’est obéir à Dieu. Enfin la politique tâche sans cesse de concilier l’erreur reçue et le bien public.
Mais vous allez en Europe ; vous serez obligé de vous conformer à quelqu’un des cultes reçus.
Quoi donc ! Ne pourrai-je faire en Europe comme ici : adorer paisiblement le Créateur de tous les mondes, le Dieu de tous les hommes, celui qui a mis dans mon cœur l’amour de la vérité et de la justice ?
Non, vous risqueriez trop ; l’Europe est divisée en factions, il faudra en choisir une.
Des factions, quand il s’agit de la vérité universelle, quand il s’agit de Dieu !
Tel est le malheur des hommes. On est obligé de faire comme eux, ou de les fuir ; je vous demande la préférence pour l’Église grecque.
Elle est esclave.
Voulez-vous vous soumettre à l’Église romaine ?
Elle est tyrannique. Je ne veux ni d’un patriarche simoniaque qui achète sa honteuse dignité d’un grand-vizir, ni d’un prêtre qui s’est cru pendant sept cents ans le maître des rois.
Il n’appartient pas à un religieux tel que je le suis de vous proposer la religion protestante.
C’est peut-être celle de toutes que j’adopterais le plus volontiers, si j’étais réduit au malheur d’entrer dans un parti.
- ↑ Actes, v, 29.