Y vont porter leur haine et leurs scandales[1],
Et le beau ciel de nous autres chrétiens
Tout comme l’autre eut aussi ses vauriens.
Ne voit-on pas, chez cet atrabilaire
Qui d’Olivier fut un temps secrétaire[2].
Ange contre ange, Uriel et Nisroc,
Contre Ariac, Asmodée et Moloc,
Couvrant de sang les célestes campagnes.
Lançant des rocs, ébranlant des montagnes ;
De purs esprits qu’un fendant coupe en deux,
Et du canon tiré de près sur eux ;
Et le Messie allant, dans une armoire,
Prendre sa lance, instrument de sa gloire ?
Vous voyez bien que la guerre est partout.
Point de repos, cela me pousse à bout.
Hé quoi, toujours alerte, en sentinelle !
Que devient donc la paix universelle
Qu’un grand ministre en rêvant proposa,
Et qu’Irénée[3] aux sifflets exposa,
Et que Jean-Jacque orna de sa faconde.
Quand il faisait la guerre à tout le monde[4] ?
[5]Ô Patouillet ! ô Nonotte, et consorts !
Ô mes amis, la paix est chez les morts !
Chrétiennement mon cœur vous la souhaite.
Chez les vivants où trouver sa retraite ?
Où fuir ? que faire ? à quel saint recourir ?
Je n’en sais point : il faut savoir souffrir[6].
Mais, dit-on, Bernard de Fontenelle, après avoir fait quelques épigrammes assez plates contre Nicolas Boileau et contre Racine, ne répondit rien au mauvais livre[7] du R. P. Baltlius, de la Société de Jésus, qui l’accusait d’athéisme pour avoir rédigé en
- ↑ Les vingt-quatre vers qui suivent ne sont pas dans l’Épître à Mme du Châtelet sur la Calomnie. Voltaire les a ajoutés, après 1760, pour lancer quelques traits à Nonotte, à Patouillet, à Jean-Jacques, et surtout à Milton, qu’il critique à cette heure comme il fait de Shakespeare.
- ↑ Milton, secrétaire d’Olivier Cromwell, et qui justifia le meurtre de Charles Ier dans le plus plat libelle qu’on ait jamais écrit. (Note de Voltaire.) — L’ouvrage de Milton est intitulé Joannis Miltoni Angli pro populo anglicano Defensio contra Claudii anonymi, alias Salmasii defensionem regiam ; Londini, 1652, in-12.
- ↑ Irénée Castel de Saint-Pierre. (Note de Voltaire.)
- ↑ Jean-Jacques a fait aussi un très-mauvais ouvrage sur ce sujet. (Id.)
- ↑ Ce sont deux ex-jésuites, les plus insolents calomniateurs de leur profession, et il en sera question dans le cours de cet ouvrage. (Id.)
- ↑ Ces deux derniers vers appartiennent à l’épître originale, qu’ils terminent.
- ↑ Réponse à l’Histoire des Oracles de M. de Fontenelle ; Strasbourg, 1707, in-8o.