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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome30.djvu/176

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forgerons pour lui faire des armes et des chariots ; et il fera de vos filles ses parfumeuses, ses cuisinieres et ses boulangeres ; et il prendra vos meilleurs champs, vos meilleures vignes, et vos meilleurs plants d’olivier[1], et les donnera à ses valets. Il prendra la dixme de vos bleds et de vos vignes, pour donner à ses eunuques ; et il prendra vos serviteurs et vos servantes, et vos jeunes gens et vos ânes, et les fera travailler pour lui [2]. Et vous crierez alors contre la face de votre roi ; et le seigneur ne vous exaucera point, parce que c’est vous-mêmes qui avez demandé un roi. Or le peuple ne voulut point entendre ce discours de Samuel, et lui dit : non, nous aurons un roi sur nous ; nous serons comme les autres peuples, et notre roi marchera à notre tête, et il combattra nos combats pour nous. Samuel ayant entendu les paroles du peuple, les rapporta aux oreilles du seigneur ; et le seigneur lui dit : fais ce qu’ils te disent ; établis un roi sur eux. Et Samuel dit aux enfans d’Israël : que chacun s’en retourne dans sa bourgade. Il y avait un homme de la tribu de Benjamin nommé Cis, fort vigoureux ; il avait un fils appellé Saül, d’une belle figure, et qui surpassait le peuple de toute la tête. Cis pere de Saül avait perdu ses ânesses. Et Cis pere de Saül dit à son fils : prends un petit valet avec toi, et va me chercher mes ânesses. Après avoir cherché, le petit valet dit : voici un village où il y a un homme de Dieu ; c’est un homme noble ; tout ce qu’il

  1. cette énumération de toutes les tyrannies qu’un roi peut exercer sur son peuple, semble prouver que M Huet pourroit être excusable de penser que Samuel voulait inspirer au peuple de l’horreur pour la royauté, et du respect pour le pouvoir sacerdotal. C’est, dit Arbuthnoth, le premier exemple des querelles entre l’empire, et le sacerdoce. Samuel, dit-il,… etc. Il est vrai que dans une histoire profane la conduite du prêtre Samuel pourrait être un peu suspecte ; mais elle ne peut l’être dans un livre canonique.
  2. pour donner à ses eunuques, semble marquer qu’il y avoit déjà des eunuques dans la terre de Canaan, ou que du moins les princes voisins fesaient châtrer des hommes pour garder leurs femmes et leurs concubines. Cet usage barbare est bien plus ancien, s’il est vrai que les pharaons d’égypte eurent des eunuques du temps de Joseph. Ceux qui pensent que tous les livres de la ste écriture, jusqu’au livre des rois inclusivement, ne furent écrits que du temps d’Esdras, disent que les rois de Babylone furent les premiers qui firent châtrer des hommes, après qu’on eut châtré les animaux pour rendre leur chair plus tendre et plus délicate. Les empereurs chrétiens ne prirent cette coutume que du temps de Constantin.