Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome30.djvu/85

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Viens donc, et je t’enverrai à pharaon... Mosé répondit, j’irai vers les enfans d’Israël, et je leur dirai, le dieu de vos peres m’envoie vers vous ; mais s’ils me demandent quel est son nom, que leur dirai-je ? Dieu dit à Mosé, je m’appelle Eheich. Tu diras aux enfans d’Israël, Eheich m’envoie à vous. [1] Dieu dit encore à Mosé, tu diras aux enfans d’Israël : le Dieu d’Abraham d’Isaac et de Jacob m’a envoyé à vous. Ce sera là mon nom à jamais de génération en génération. Ils écouteront ta voix, et tu iras avec les anciens d’Israël devant le roi d’égypte, et tu lui diras : le dieu des hébreux nous a appellés, et il faut que nous allions à trois journées dans le désert pour sacrifier au seigneur notre Dieu ; [2] mais je sais que le roi d’égypte ne permettra point qu’on y aille si on ne le contraint par une main forte... chaque femme demandera à sa voisine ou à son hôtesse des vases d’arg

    a repris sa premiere stérilité ; il s’en faut beaucoup qu’elle vaille aujourd’hui la Corse, à laquelle elle ressemble parfaitement.

  1. les critiques reprennent Mosé d’avoir demandé à Dieu son nom. Ils disent que puisqu’il le reconnaissait pour le dieu du ciel et de la terre, il ne devait pas supposer qu’il eût un nom appélatif, comme on en a donné aux hommes et aux villes. Que Dieu ne s’appelle ni Jean, ni Jacques ; et que les israëlites ne l’auraient pas plus reconnu à ce nom de eheich qu’à tout autre nom. Ce mot de eheich est ensuite changé en celui de Jehovah qui signifie, dit-on, destructeur, et que quelques-uns croient signifier créateur. Les égyptiens le prononçaient jaou ; et quand ils entraient dans le temple du soleil ils portaient un philactere sur lequel jaou était écrit. Origene, dans son premier livre contre Celse, dit qu’on se servait de ce mot pour exorciser les esprits malins. Saint Clément d’Alexandrie, dans son cinquieme livre des stromates, assure qu’il n’y avait qu’à prononcer ce mot à l’oreille d’un homme pour le faire tomber roide mort, et que Moyse l’ayant prononcé à l’oreille de Nechefre roi d’égypte, ce monarque en mourut subitement. Ce mot jaou signifiait dieu chez les anciens arabes ; et c’est encore le mot sacré dans les prieres des mahometans. Sanchoniathon, le plus ancien des auteurs dans cette partie du monde, écrit jévo. Origene et Jérôme veulent qu’on prononce jao. Les samaritains, qui s’éloignaient en tout des autres juifs, prononçaient javé. C’est delà que vient le nom de jovis, jovispiter, jupiter, chez les anciens toscans et chez les latins. Les grecs firent de jéhova leur heus, qui était le premier des dieux, le grand dieu. C’est ainsi qu’ils prononcerent theos, les latins deus, et nous dieu ; c’est ainsi que les allemands prononcent gott. Les peuples de la Scandinavie gud, les anglais god. Origene est fermement persuadé qu’on ne peut faire aucune opération magique qu’avec le nom de jéhova. Il affirme que si on se sert de tout autre nom, il sera impossible de produire aucun enchantement.
  2. plusieurs commentateurs disputent ici sur la prescience, sur la liberté, et sur le futur contingent. Dieu sait positivement que pharaon n’écoutera point Mosé ; et cependant le pharaon sera libre de l’écouter. On a fait un très grand nombre de volumes sur cette question, qu’on a toujours creusée et dont on n’a pas encore apperçu le fond. Il suffit de savoir que Dieu est tout puissant, et que l’homme est libre pour mériter ou démériter. Qu’on soit libre, ou qu’on ne le soit pas, les hommes agiront toujours comme s’ils l’étaient.