Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome31.djvu/106

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la cathédrale : donc Pierre a gouverné dans Rome toute l’Église, qui n’existait pas, ce qui était à démontrer. Tel est le fondement de la restitution faite au pape de la moitié du monde chrétien.

Cette pièce curieuse est si peu connue dans notre île qu’il est bon d’en donner ici un petit extrait. C’est Constantin qui parle :

« Nous, avec nos satrapes, et tout le sénat et le peuple soumis au glorieux empire, nous avons jugé utile de donner au successeur du prince des apôtres une plus grande puissance que celle que notre sérénité et notre mansuétude ont sur la terre. Nous avons résolu de faire honorer la sacro-sainte Église romaine plus que notre puissance impériale, qui n’est que terrestre ; et nous attribuons au sacré siège du bienheureux Pierre toute la dignité, toute la gloire, et toute la puissance impériale... Nous possédons les corps glorieux de saint Pierre et de saint Paul, et nous les avons honorablement mis dans des caisses d’ambre que la force des quatre éléments ne peut casser. Nous avons donné plusieurs grandes possessions en Judée, en Grèce, dans l’Asie, dans l’Afrique, et dans l’Italie, pour fournir aux frais de leurs luminaires. Nous donnons en outre à Silvestre, et à ses successeurs, notre palais de Latran, qui est plus beau que tous les autres palais du monde.

« Nous lui donnons notre diadème, notre couronne, notre mitre, tous les habits impériaux que nous portons, et nous lui remettons la dignité impériale et le commandement de la cavalerie.... Nous voulons que les révérendissimes clercs de la sacrosainte romaine Église jouissent de tous les droits du Sénat : nous les créons tous patrices et consuls. Nous voulons que leurs chevaux soient toujours ornés de caparaçons blancs, et que nos principaux officiers tiennent ces chevaux par la bride, comme nous avons conduit nous-même par la bride le cheval du sacré pontife.

« Nous donnons en pur don au bienheureux pontife la ville de Rome, et toutes les villes occidentales de l’Italie, comme aussi les autres villes occidentales des autres pays. Nous cédons la place au saint-père ; nous nous démettons de la domination sur toutes ces provinces ; nous nous retirons de Rome, et transportons le siège de notre empire en la province de Byzance, n’étant pas juste qu’un empereur terrestre ait le moindre pouvoir dans les lieux où Dieu a établi le chef de la religion chrétienne.

« Nous ordonnons que cette notre donation demeure ferme jusqu’à la fin du monde ; et si quelqu’un désobéit à notre décret, nous voulons qu’il soit damné éternellement, que les apôtres Pierre et Paul lui soient contraires en cette vie et en l’autre, et