Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome31.djvu/18

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8 DERNIERES REMARQUES

XI. — [En noie.) J'aurais désiré qu'en applaudissant à la destruction des j(suites, l'auteur se fût élevé contre l'horrible dureté avec laiiuelle on a traité tant d'individus, la plupart innocents du fanatisme et des intrigues de leur ordre. On a trop oublié qu'ils avaient été des hommes et des citoyens avant d'être des jésuites; et l'opération la plus utile à la raison et au bonheur de l'humanité a été souillée par les emportements de la vengeance et du fana- tisme. C.

Vous êtes tro]) 1)011, monsieur; il semble qu'on ait fait une Sainl-Bartiiélemy des jésuites : il n'y a eu pourtant que frère Mala- t;rida de brûlé en Portugal, et le général Ricci de mort en prison à Rome. V.

XII. — Rien ne prouve mieux l'utilité des lumières, et ne donne une espérance mieux fondée que le temps n'est pas éloigné peut-être où les erreurs qui ont fait si longtemps le malheur des hommes disparaîtront enfin de la terre.

{El en noie.) Je crains que l'auteur ne se trompe ici, et que la dosti'uc- tion des jésuites n'ait plus été l'ouvrage du jansénisme que de la raison. Peut-être le genre humain est-il condamné à être toujours esclave des pré- jugés, et ne fera-t-il que changer d'erreurs. Cela peut tenir à la prodigieuse inégalité des esprits, de laquelle il résulte nécessairement qu'il y aura tou- jours des opinions que la multitude adoptera sans les entendre. C.

Qu'aurait dit à cela notre ami Helvélius, qui assura que tous les esprits étaient égaux, pour dire quelque chose de neuf, et qui fut condamné ' par gens graves se mêlant peu des choses d'esprit? V.

XIII. — Esprits forts : en noie) c'est le nom que, dans le siècle dernier, on donnait à ceux qui ne croyaient pas la religion chrétienne, comme si c'était là une preuve de force d'esprit. Ce mot est devenu de mauvais goût ; les noms de libertins, d'incrédules, de matérialistes, de déistes, d'athées, ont passé rapidement, et on s'est arrêté ii celui de philosophes ou d'encyclopé- distes, dont l'un signifie ami de la vérité, et l'autre, coopérateur de VEncy- dopédie. Ces mots dureront longtemps, parce que, les rendant ainsi synonymes d'incrédules, on peut espérer de trouver le moyen de nuire aux véritables philosophes, et aux savants célèbres qui ont travaillé à l'Ency- clopédie. C.

Il faut toujours en France persécuter quelqu'un : tantôt c'est Vanini, à qui on a fait accroire qu'il est sorcier et athée, parce ([u'on a trouvé chez lui un crapaud dans une bouteille; tantôt

��1. La condamnation par le parlement du livre de l'Esprit, par Helvétius, est du février 1759.

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