RONDEAU. 271
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Qu'il fasse mieux, ce jeune jouvencel. A (|ui le Ciil donne tant de martel, Que d'entasser injure sur injure, Rimer do rage une lourde imj)Osture, Et se cacher ainsi qu'un criminel -.
Chacun connoît son jaloux naturel. Le montre au doigt comme un fou solennel. Et ne croit pas, en sa bonne écriture, Qu'il fasse mieux.
Paris entier ayant vu son cartel ■', L'envoie au diable, et sa muse au bordel *. Moi, j'ai pitié des peines qu'il endure, Et, comme ami, je le prie et conjure, S'il veut ternir un ouvrage immortel, Ou il fasse mieux.
��1. Ce rondeau fut fait par Corneille, en 1637, dans le temps du différend qu'il eut avec Scudéri, au sujet des Observations sur le Cid. {Note de Voltaire.)
— Ce n'est point contre Scudéri, mais contre Mairet, qu'est dirigé ce rondeau. C'était à Mairet que Corneille attribuait l'opuscule en vers intitulé l'Atitheur du vi'at Cid espagnol à son traducteur françois.
2. Scudéri n'avait pas d'abord mis son nom à ses Observations sur le Cid. Il en fut fait deux éditions sans qu'on sût de quelle part elles venaient. Cela se découvrit néanmoins, et les brouilla ensemble. {Note de Voltaire.)
3. Édit orig. : ayant lu son cartel.
4. Ce terme grossier n'est pas tolérable ; mais Régnier et beaucoup d'autres l'avaient employé sans scrupule. Boileau même, dans le siècle des bienséances, en 1674, souilla son chef-d'œuvre de l'Art j^oétique par ces deux vers, dans lesquels il caractérisait Régnier (chant IT, v. 171) :
Heureux si, moins hardi dans ses vers pleins de sel, Il n'avoit point traîné les muses au bordel !
Ce fut le judicieux Arnauld qui l'obligea de réformer ces deux vers, où fauteur tombait dans le défaut qu'il reprochait à Régnier. Boileau substitua ces deux vers excellents :
Heureux si ses discours, craints du chaste lecteur. Ne se sentoient des lieux où fréquentoit l'auteur.
Il eût été à souhaiter que Corneille eût trouvé un Arnauld : il lui eût fait sup- primer son rondeau tout entier, qui est trop indigne de l'auteur du Cid. {Note de Voltaire.)
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