Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome31.djvu/61

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thode sûre, le faux des sophismes de Platon, qui supposaient toujours ce qui est en question. Il était nécessaire d’enseigner à confondre des gens qui vous disaient froidement : « Le Vivant vient du mort : donc les âmes sont dans les enfers. » Cependant le style de Platon prévalut, quoique ce style de prose poétique ne convienne point du tout à la philosophie. En vain Démocrite et ensuite Épicure combattirent les systèmes de Platon : ce qu’il y avait de plus sublime dans son roman de l’âme fut applaudi presque généralement ; et lorsque Alexandrie fut bâtie, les Grecs qui vinrent l’habiter furent tous platoniciens.

Les Juifs, sujets d’Alexandre, comme ils l’avaient été des rois de Perse, obtinrent de ce conquérant la permission de s’établir dans la ville nouvelle dont il jeta les fondements, et d’y exercer leur métier de courtiers, auquel ils s’étaient accoutumés depuis leur esclavage dans le royaume de Babylone. Il y eut une transmigration de Juifs en Égypte, sous la dynastie des Ptolémées, aussi nombreuse que celle qui s’était faite vers Babylone. Ils bâtirent quelques temples dans le Delta, un entre autres nommé l’Onion, dans la ville d’Héliopolis, malgré la superstition de leurs pères, qui s’étaient persuadés que le Dieu des Juifs ne pouvait être adoré que dans Jérusalem.

Alors le système de Platon, que les Alexandrins adoptèrent, fut reçu avidement de plusieurs Juifs égyptiens, qui le communiquèrent aux Juifs de la Palestine.


Chapitre IV. Sectes des Juifs.

Dans la longue paix dont les Juifs jouirent sous l’Arabe iduméen Hérode, créé roi par Antoine, et ensuite par Auguste, quelques Juifs de Jérusalem commencèrent à raisonner à leur manière, à disputer, à se partager en sectes. Le fameux rabbin Hillel, précurseur de Gamaliel, de qui saint Paul fut quelque temps le domestique, fut l’auteur de la secte des pharisiens, c’est-à-dire des distingués. Cette secte embrassait tous les dogmes de Platon : âme, figure légère enfermée dans un corps ; âme immortelle, ayant son bon et son mauvais démon ; âme punie dans un enfer, ou récompensée dans une espèce d’Élysée ; âme transmigrante, âme ressuscitante.

Les saducéens ne croyaient rien de tout cela : ils s’en tenaient