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280 REMARQUES SUR BÉRÉNICE.

��SCENE III.

Vers 12 Suspendez votre ressentiment.

D'autres, loin de se taire en ce même moment, Triompheroient peut-être, etc.

Concevez l'excès de la tyrannie de la rime, puisque l'auteur qui lui commande le plus est gêné par elle au point de remplir un hémistiche de ces mots inutiles et lâches, en ce même moment.

Vers 23. Vous voyez devant vous une reine éperdue,

Oui, la mort dans le sein, vous demande deux mots.

Deux mots, ailleurs, seraient une expression triviale ; elle est ici touchante : tout intéresse, la situation, la passion, le discours de Bérénice, l'embarras même d'Antiochus.

Vers 67. Pour jamais à mes yeux gardez-vous de paroître.

Voilà le caractère de la passion. Bérénice vient de flatter tout à l'heure Antiochus pour savoir son secret ; elle lui a dit : Si jamais je vous fus chère, parlez : elle l'a menacé de sa liai tic s'il garde le silence, et dès qu'il a parlé elle lui ordonne de ne jamais paraître devant elle. Ces flatteries, ces emportements, font un effet très-intéressant dans la houche d'une femme ; ils ne touche- raient pas ainsi dans un homme. Tous ces symptômes de l'amour sont le partage des amantes. Presque toutes les héroïnes de Bacine étalent ces sentiments de tendresse, de jalousie, de colère, de fureur ; tantôt soumises, tantôt désespérées. C'est avec raison qu'on a nommé Racine le_p_oëtedes femmes. Ce n'est pas là du vrai tragique ; mais c'est la IsealîûTqTïéTesujet comportait.

��SCÈNE IV.

Vers pén. Va voir si la douleur ne l'a point trop saisie.

Tous les actes de cette pièce finissent par des vers faihles et un peu langoureux. Le public aime assez que chaque acte se termine par quelque morceau brillant qui enlève les applaudis- sements. Mais Bérénice réussit sans ce secours. Les tendresses de l'amour ne comportent guère ces grands traits qu'on exige à la fin des actes dans des situations vraiment tragiques.

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