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ANNÉE 1723.

Je serai demain à Ussé, où je compte trouver une épître de vous. Je suis très-malade, mais je me suis accoutumé aux maux du corps et à ceux de l’âme : je commence à les souffrir avec patience, et je trouve dans votre amitié et dans ma philosophie des ressources contre bien des choses. Adieu.



78. — À M. THIERIOT.

Ce 3 janvier 1723.

J’écris par extraordinaire une lettre très-pressante et très-pathétique à madame la maréchale, à qui je recommande vos intérêts, dont j’ose me flatter qu’elle aura soin ; je vous remercie infiniment, mon cher ami, de vos visites chez ma sœur ; voyez-la souvent, je vous en conjure, et mettez-moi un peu bien avec elle. La nouvelle de Rousseau, séminariste, ressemble à celle de la Fillon[1], qui se retira, il y a quelques années, dans un couvent. Il me paraît que le diable n’est pas encore assez vieux pour se faire ermite.

On m’a envoyé un éloge de feu Marc-René[2], par M. de Fontenelle, qui me paraît tout à fait sage et plein d’esprit. Je ne sais pas comment on en juge à Paris.

J’ai, je crois, achevé et poëme et remarques. J’ai composé une petite histoire abrégée[3] de ce temps-là, pour mettre à la tête de l’ouvrage. J’ai fait aussi un Discours[4] au roi ; voilà à quoi je me suis occupé. La parodie de Persée[5] n’a point aigri l’amertume que j’ai dans ma vie depuis longtemps. Je pardonne volontiers aux gredins d’auteurs ces trivelinades, c’est leur métier : il faut que chacun fasse le sien ; le mien est de les mépriser. Vous ne me mandez point ce qu’ont fait les peintres ; écrivez-moi un peu quelques détails sur cela. Je vous enverrai incessamment un mémoire que je ferai distribuer aux juges de Beauregard ; je ne sais si je me flatte, mais je crois que vous en serez content. Faites ma cour à Mme de Bernières ; je suis infiniment sensible à son amitié.

  1. Voyez, tome XV, le chapitre Ier du Précis du Siècle de Louis XV.
  2. D’Argenson ; voyez ci-dessus, no 32.
  3. L’Essai sur les Guerres civiles de France ; voyez tome VIII.
  4. On le trouve au commencement des Pièces inédites publiées, en 1820, par M. Jacobsen. C’est un modèle d’épître dédicatoire. Voyez tome VIII, page 1.
  5. Dans l’Arlequin Persée, parodie du Persée de Quinault, jouée le 18 décembre 1722, Fuzelier, avait (scène ii, acte Ier) mis cinq couplets contre la souscription annoncée dans le Mercure de novembre, pour imprimer Henri IV, ou la Ligue, poëme héroïque de M. de Voltaire. (B.)