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285. — Á M. DE MAUPERTUIS.
Fontainebleau, 30 octobre 1732, à l’hôtel de Richelieu.

Étant à la cour, monsieur, sans être courtisan, et lisant des livres de philosophie sans être philosophe, j’ai recours à vous dans mes doutes, bien fâché de ne pouvoir jouir du plaisir de vous consulter de vive voix. Il s’agit du grand principe de l’attraction de M. Newton. À qui puis-je mieux m’adresser qu’à vous, monsieur, qui l’entendez si bien, qui travaillez même sur sa philosophie, et qui êtes si capable d’en confirmer la vérité ou d’en démontrer le faux ?

Je vous envoie mon petit mémoire que j’avais fait très-long pour un autre, et que j’ai fait très-court pour vous[1], bien sûr que, sur le seul énoncé, vous suppléerez à tout ce qui y manque. Je vous demande pardon de mon importunité ; mais je vous supplie très-instamment de vouloir bien employer un moment de votre temps à m’éclairer. J’attends votre réponse, pour savoir si je dois croire ou non à l’attraction. Ma foi dépendra de vous, et, si je suis persuadé de la vérité de ce système, comme je le suis de votre mérite, je suis assurément le plus ferme newtonien du monde.

J’ai l’honneur d’être, monsieur, avec toute l’estime que je vous dois, votre, etc.


286. — Á M. DE MAUPERTUIS.
Fontainebleau, 3 novembre.

Je ne vous avais demandé qu’une démonstration, et vous m’en donnez deux ! Je vous remercie assurément de tout mon cœur de votre libéralité, et je suis bien aise de voir que ce sont les riches qui sont prodigues. Vous avez éclairci mes doutes avec la netteté la plus lumineuse : me voici newtonien de votre façon ; je suis votre prosélyte, et fais ma profession de foi entre vos mains. À la manière dont vous écrivez, je ne doute pas que votre livre[2] ne vous fasse bien des disciples. Vous êtes si intelligible que, sans doute, unusquisque audiet linguam suam.

  1. Le Mémoire joint à cette lettre traitait de la gravitation, de l’attraction ; sujet traité dans la quinzième des Lettres philosophiques ; voyez tome XXII, page. 132 et suiv.
  2. Discours sur les différentes figures des astres, avec une exposition abrégée des systèmes de Descartes et de Newton ; Paris, 1732, in-8o