Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome33.djvu/488

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I flatter myself, my dear friend, you will corne to see the house I build, but you never will talk about it. In winter time you may be my correspondent at Paris, and live with your brother ; but in the warmer season you must live with me. We must read together your friend’s plays, his opéras, his epic poems, his philosophical follies, ail that be bas scribbled in your absence. Misfortune never dejected me ; and my genius always grew bolder when they attempted at submitting it. What a pleasure I shall enjoy when I see you again, open to you my soul, and shew you all my works ! Literature is nothing without a friend ; and a friend illiterate is but dry company : but a friend like you is a treasure.

Are you informed which are the best journals in Holland, or in other countries ? and will you be so kind as to give me notice of them, of their authors, and liow tliey may be got ? but especially write me your news. Corne to Paris. Stay at your brother’s all the winter, see me in the spring, and love me for ever as I do you.

The lady du Ch… understands English as well as I[1].

  1. Traduction : Je reçois, mon cher ami, dans le moment, votre lettre qui me fait espérer de vous revoir bientôt, quoiqu’il soit invraisemblable que je ne pourrai pas vous voir à Paris, parce qu’il entre dans mes projets de demeurer un an ou deux à la campagne. Je bâtis une jolie petite maison pour Mme  du Châtelet. Cet amusement, qui m’est prescrit par l’amitié, me retiendra, mais avec beaucoup de plaisir, loin de Paris. Vous savez qu’Apollon se fit maçon quand il fut chassé du ciel. Je suis dans le ciel quand je deviens maçon par attachement pour mes amis. C’est pourquoi je vous prie d’abord avec instance d’apporter avec vous deux petites serrures d’Angleterre, de cuivre, extrêmement jolies, les fables de Dryden, deux ou trois volumes de ses lettres, et quelques-uns des meilleurs livres que vous trouverez relatifs aux prêtres

    Je me flatte, mon cher ami, que vous viendrez voir la maison que je bâtis, mais que jamais vous n’en parlerez. En hiver, vous pouvez être mon correspondant à Paris, et vivre avec votre frère ; mais dans l’été vous devez vivre avec moi. Nous lirons ensemble les pièces de votre ami, ses opéras, ses poèmes épiques, ses folies philosophiques, et tout ce qu’il a écrit pendant notre absence. Le malheur ne m’a jamais abattu, et mon esprit est devenu toujours plus hardi en raison des efforts qu’on a faits pour le soumettre. Quel plaisir j’aurai à vous revoir encore, à vous ouvrir mon âme, et à vous montrer tous mes ouvrages ! La littérature n’est rien sans un ami, et un ami illettré est une bien sèche compagnie ; mais un ami tel que vous est un trésor. Savez-vous quels sont les meilleurs journaux en Hollande et dans d’autres pays, et seriez-vous assez bon pour me donner une notice de ces journaux, de leurs auteurs, et comment on peut se les procurer ; mais surtout donnez-moi de vos nouvelles. Revenez à Paris, passez-y l’hiver avec votre frère. Venez me voir au printemps, aimez-moi à jamais comme je vous aime.


    Mme  du Châtelet entend l’anglais aussi bien que moi.