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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome33.djvu/97

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ANNÉE 1722.

Haye. Mon dessein donc est que le public soit informé que ce livre se débitera à Paris comme en Hollande, afin de ne point effaroucher les souscripteurs, selon les idées que j’ai toujours eues sur cela, et qui ont été invariables.

Quel démenti aurais-je donc ? et que pourra me reprocher la canaille d’auteurs, quand mon ouvrage paraîtra imprimé en Hollande, et sera débité en France ? Quel ridicule sera-ce à moi de voir mon poëme être reçu dans ma patrie avec l’approbation des supérieurs ? Je n’ai que faire d’écrire au cardinal. Je viens de recevoir un billet du garde des sceaux, qui me croyait à Paris, et qui m’ordonnait de venir lui parler, apparemment au sujet de mon livre. C’est à lui que je vais écrire pour lui expliquer mes intentions.

À l’égard de M. Detroy, c’est de tout mon cœur et avec autant de plaisir que de reconnaissance que je verrai le dessin du frontispice exécuté de sa main. Je vous prie de l’en remercier de ma part, et de lui dire que je ne lui écris point parce que je suis malade. Vous pouvez fort bien dire à M. Coypel que les retardements qu’il apporte seront préjudiciables à l’édition de l’ouvrage ; qu’ainsi vous croyez que je serai assez honoré et assez content quand je n’aurai que deux dessins de sa façon. S’il persiste à vouloir pour lui le dessin qui doit être à la tête, vous pourrez lui dire tout simplement qu’il est juste que ce soit un morceau pour le professeur, qui, sans cette préférence, ne voudra pas livrer ses dessins.

Si cette déclaration le fâche, et si, par là, vous le mettez au point de refuser le tout, alors ce sera moi qui aurai à me plaindre de lui, et non lui de moi : en ce cas, vous exagérerez auprès de lui l’estime que je fais de ses talents, et la douleur où je serai de n’être point embelli par lui. Remerciez bien Detroy et Gailoche ; dites-leur que je leur écrirai incessamment ; tâchez de consommer au plus vite cette négociation. J’ai trouvé à Ussé un peintre qui me fera fort bien mes vignettes. Écrivez-moi un peu des nouvelles des actions. G… ne peut rien auprès des Pâris, que par M. de Maisons[1], qui a déjà été refusé, comme vous savez. J’écrirai une lettre très-forte à madame la maréchale[2], et je profiterai de mon loisir pour en faire une en vers aux Pâris, où je serai inspiré par mon amitié, qui est assurément un Apollon assez vif.

  1. Ami de Voltaire, neveu de la maréchale de Villars, président au parlement. Il était âgé de vingt-trois ans.
  2. De Villars ; voyez page 50.