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Bruxelles, lequel a persuade à la pauvre Mme  Viana que son mari était mort hérétique, et que, par conséquent, elle ne pouvait en conscience garder de l’argent chez elle, et qu’il fallait remettre tout entre les mains de son confesseur. La dame Viana, pleine de componction, lui a confié tout son argent. Le cocher qui a aidé le révérend Père à porter les sacs dépose juridiquement contre le révérend Père. Le bon homme dit qu’il ne sait ce que c’est, et prie Dieu pour eux. Le peuple cependant veut lapider le saint. On va juger l’affaire[1]. Il faut ou le pendre ou le canoniser, et peut-être sera-t-il l’un et l’autre.

Adieu, mon ami ; ne soyons ni l’un ni l’autre.


1183. — À M. PRAULT[2].
À Bruxelles, 21 juillet.

Depuis que j’ai vu la nouvelle édition de Ledet, je suis plus que jamais, mon cher Prault, dans la résolution de vous en procurer une qui vous soit utile et honorable. Je crois que vous pouvez compter sur la protection de M. d’Argenson, comme sur mon zèle. Je serais trop fâché que les étrangers profitassent seuls de mon travail, et que le libraire de Paris que j’estime le plus n’eût de moi que des offres inutiles de service. Je suis donc tout prêt ; parlez, quand commencerez-vous ? Je vous offre et mon travail et de l’argent.

Je ne crois pas que vous gagniez à débiter ce petit Essai sur Molière, qui n’a été fait que pour être joint à l’édition de ses œuvres. M. Pallu m’avait prié d’y travailler ; mais quand l’ouvrage fut fait, on donna la préférence, comme de raison, à M. de La Serre, qui avait commencé avant moi, et qui, d’ailleurs, retirait de son travail un profit que j’aurais été au désespoir de lui ôter.

S’il est vrai que mes Épîtres et le commencement du Siècle de Louis XIV paraissent, je vous prie de les chercher et de me les envoyer. Au reste, vous ne ferez rien qu’avec prudence, et je m’en rapporte à vous.

My services to your lady. Si vous voyez le père du Sopha, je suis son ami pour la vie.

  1. Voyez, sur cette affaire, l’Essai sur les probabilités en fait de justice, tome XXVIII. Voyez aussi lettre à d’Argenson du 21 mai 1740.
  2. Éditeurs, de Cayrol et François.