Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome36.djvu/136

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Petits-maitres, pédants rigris[1],
Parlent de vous sans intervalle.
Sitôt que je suis aperçu,
On court, on m’arrête au passage ;
« Eh bien ! dit-on, l’avez-vous vu.
Ce roi si brillant et si sage ?
Est-il vrai qu’avec sa vertu
Il est pourtant grand politique ?
Fait-il des vers, de la musique
Le jour même qu’il s’est battu ?
Comment, à lui-même rendu,
Le trouvez-vous sans diadème,
Homme simple redevenu ?
Est-il bien vrai qu’alors on l’aime
D’autant plus qu’il est mieux connu,
Et qu’on le trouve dans lui-même ?
On dit qu’il suit de près les pas
Et de Gustave et de Turenne
Dans les camps et dans les combats,
Et que le soir, dans un repas,
C’est Catulle, Horace, et Mécène. »
À mes côtés un raisonneur,
Endoctriné par la gazette,
Me dit d’un ton rempli d’humeur :
« Avec l’Autriche on dit qu’il traite.
— Non, dit l’autre, il sera constant,
Il sera l’appui de la France. »
Une bégueule, en s’approchant,
Dit « Que m’importe sa constance ?
Il est aimable, il me suffit ;
Et voilà tout ce que j’en pense ;
Puisqu’il sait plaire, tout est dit. »
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Thieriot · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · ·
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Envoyer au roi des fromages,
Et les emballer prudemment
Dans certains modernes ouvrages.
Thieriot me dit tristement :
« Ce philosophe conquérant
Daignera-t-il incessamment
Me faire payer mes messages ? »
Ami, n’en doutez nullement ;
On peut compter sur ses largesses ;

  1. Voyez la note, tome IV, page 420.