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toujours très-bien auprès de ceux que vous aimez, et je compte sur votre protection : j’ose ici joindre mes vœux pour la santé des reines et de toute la famille royale. Adieu, monsieur, aimez un peu Voltaire.


1718. — À LA PRINCESSE ULRIQUE[1].
À Paris, ce 2 mai 1745[2]

Madame, j’ai eu la consolation de voir ici M. Hourleman[3], dont j’estropie peut-être le nom, mais qui n’estropie pas les nôtres, car il parle français comme Votre Altesse royale. Il m’a assuré, madame, du souvenir dont vous daignez m’honorer, et il augmente, s’il se peut, mes regrets et mon attachement pour votre personne. Je n’ai jamais eu plus de plaisir que dans sa conversation ; il ne m’a cependant rien appris de nouveau ; il m’a dit combien Votre Altesse royale est idolâtrée de toute la Suède. Qui ne le sait pas, madame, et qui ne plaint pas les pays que vous n’embellissez point ? Il dit qu’il n’y a plus de glaces dans le Nord, et que je n’y trouverai que des zéphyrs, si jamais je peux aller faire ma cour à Votre Altesse royale. Rempli la nuit de ces idées, je vis en songe un fantôme d’une espèce singulière.

À sa jupe courte et légère[4],
À son pourpoint, à son collet,
Au chapeau chargé d’un plumet,
Au ruban ponceau qui pendait
Et par devant et par derrière,
À sa mine galante et fiere
D’amazone et d’aventurière,
À ce nez de consul romain,
À cette fierté[5] d’héroïne,

  1. Princesse royale de Suède depuis juillet 1744.
  2. Cette lettre est dans Beuchot à la date de mai 1750. M. V. Advielle, d’après l’original conservé à la Bibliothèque de Stockholm, donne celle du 2 mai 1745. La réponse de la princesse Ulrique (lettre 1749) doit aussi être rapportée, par consequent, de juillet 1750 à juillet 1745.
  3. Var. Beuchot : Esourleman.
  4. Cette pièce de vers a été publiée incorrectement, en 1751, par M. Arckenholtz, dans ses Mémoires concernant Christine, reine de Suède, tome II, page 293. — Voltaire se plaint, dans une lettre à un membre de l’Académie de Berlin (Potsdam, 15 avril 1752), de ce que ledit Arckenholtz avait estropié et falsifié ce poëme,
    dont il donne la copie. Or cette copie n’est pas si conforme à l’original que la
    copie dite falsifiée par Arckenholtz. (V. A.)

  5. À ce front altier d’héroïne.
    (Var. Beuchot.)