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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome36.djvu/4

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CORRESPONDANCE


1394. ‑ À M. LE COMTE D’ARGENTAL.
À Bruxelles, ce 6 de janvier 1741.

Je suis arrivé à Bruxelles bien tard, mais le plus tôt que j’ai pu, mon cher ange gardien ; la Meuse, le Rhin et la mer, m’ont tenu un mois en route. Ne pensez pas, je vous en prie, que le voyage de Silésie ait avancé mon retour[1] ; quand on m’aurait offert la Silésie, je serais ici. Il me semble qu’il y a une grande folie à préférer quelque chose au bonheur de l’amitié. Que peut avoir de plus celui à qui la Silésie demeurera ?

Je suis obligé de m’excuser de mon voyage à Berlin auprès d’un cœur comme le vôtre : il était indispensable ; mais le retour l’était bien davantage. J’ai refusé au roi de Prusse deux jours de plus qu’il me demandait. Je ne vous dis pas cela par vanité il n’y a pas de quoi se vanter mais il faut que mon ange gardien sache au moins que j’ai fait mon devoir. Jamais Mme du Châtelet n’a été plus au-dessus des rois.


1395. À MADEMOISELLE QUINAULT.
Ce 6 janvier 1741, à Bruxelles.

En revenant d’auprès des rois et des reines, auprès de quelqu’un qui leur est très-supérieur, je reçois, mademoiselle, votre billet et vos ordres ils me sont très-chers il ne me manque que de savoir le nom de l’homme à qui vous vous intéressez et à qui je m’intéresse déjà. Je vous remercie des prophéties favorables que vous faites de notre prophète de la Mecque il faut, pour l’honneur de vos prédictions, que j’envoie quantité de changements qui sont tout prêts, et il n’y en a pas encore assez. J’ai toujours eu une grande prédilection pour cet enfant l’autre,

  1. Voltaire, vers le 3 décembre 1740, quitta Frédéric, qui ne partit que le 15 du même mois pour la conquête de la Silésie.