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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome36.djvu/53

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1434. — À M. DE MAUPERTUIS.
À Bruxelles, le 4 mai.

Mme du Châtelet, monsieur, m’a dérobé une marche : elle a envoyé sa lettre avant la mienne mais je n’ai été ni moins touché ni moins inquiet, et je n’ai pas été moins satisfait qu’elle, quand j’ai appris votre heureuse arrivée à Vienne, après tant de fatigues et de dangers. Vous êtes fait pour plaire partout où vous êtes mais vous ne plairez jamais tant à personne qu’à vos compatriotes, quand vous les reverrez. Ils sont plus dignes que les Islandais de jouir de votre commerce.

Si vous prenez le parti de repasser en France, et que vous preniez votre chemin par Bruxelles, vous porterez la consolation et la joie dans notre solitude. Vous savez, sans doute, combien tout le monde s’est intéressé à votre destinée. Croyez que ce n’est pas à Bruxelles qu’on vous aime le moins. Il y a deux personnes ici qui ne sont point du tout du même avis sur les imaginations de Leibnitz, mais qui se réunissent à vous estimer et à vous aimer de tout leur cœur.

Conservez-moi, je vous en prie, l’amitié que vous m’avez toujours témoignée, et surtout conservez-vous.


1435. — À M. DE MAIRAN.
À Bruxelles, le 5 mai.

J’ai reçu, monsieur, votre certificat[1] ; mais je vois que l’Académie est neutre, et n’ose pas juger un procès qui me paraît pourtant assez éclairci par vous.

Je crois que la Société royale serait plus hardie, et ne balancerait pas à prononcer qu’en temps égal deux font deux, et quatre font quatre : car, en vérité, tout bien pesé, voilà à quoi se réduit la question.

Franchement, Leibnitz n’est venu que pour embrouiller les sciences. Sa raison insuffisante, sa continuité, son plein, ses monades, etc., sont des germes de confusion dont M. Wolff a fait éclore méthodiquement quinze volumes in-4o, qui mettront plus que jamais les têtes allemandes dans le goût de lire beaucoup et d’entendre peu. Je trouve plus à profiter dans un de vos mémoires

  1. Le Rapport sur le Mémoire de Voltaire concernant les forces motrices.