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portate seco a Berlino. Intanto bacio le leggiadre mani che scrivono, che toccano le più delicate cose[1].


Adieu, belle fleur d’Italie,
Transplantée aux climats des néants grenadiers ;
Revenez, mêlez-vous aux forêts de lauriers
Que fait croître en ces lieux l’Apollon des guerriers ;
Quelle terre par vous ne serait embellie !

Voulez-vous bien avoir la bonté de faire souvenir de moi l’estomac de milord et milady Tyrconnell, la poitrine de M. le maréchal Keith, les uretères de M. le comte de Rottembourg ? Je me flatte que, par un si beau temps, il n’y aura plus de malade que moi.


2238. — À FRÉDÉRIC II, ROI DE PRUSSE[2].
(1751.)

Sire, il faut dire la vérité aux rois, malgré la belle réputation qu’ils ont de ne la vouloir pas entendre. Je vous jure en honnête homme que ce que nous appelons blé ne se sème pas deux fois l’an. Nous ne donnons point le nom de blé aux grains qui se sèment en mars. Songez que vous parlez du blé avec lequel on fait le pain de monsieur le comte[3] et qu’assurément ce blé n’est semé qu’une fois. Vous perdez l’occasion de faire un beau vers, pour dire une chose qui dans notre langue ne se trouve pas vraie, quoiqu'elle puisse l’être dans les langues où l’on se sert d’un terme général, comme grain, pour signifier le blé, l’avoine et l’orge. Mais encore une fois, le blé, dans notre langue, est consacré au froment. Je vous dis tout cela pour la décharge de ma conscience. J’aurais trop de reproches à me faire si on semait deux fois par an ce que nous appelons du blé pour monsieur le comte. Semez des lauriers trois ou quatre fois par an, et des lauriers de toute espèce : Votre Majesté le peut ; mais pour du blé, je l’en défie, malgré tout mon profond respect.

  1. Traduction : Si vous êtes malade, je vous plains ; si vous êtes bien portant, je m’en réjouis. Si vous vous amusez, je vous loue ; si vous restez tranquille à Berlin, vous faites bien ; si vous revenez à notre abbaye, vous ferez grand plaisir aux frères, et vous m’apporterez une grande consolation. Mais quoi qu’il en soit du comment et du pourquoi, je vous prie de me renvoyer les bagatelles historiques que vous avez emportées avec vous à Berlin. Sur ce, je baise les élégantes mains qui écrivent, qui touchent les plus délicates choses.
  2. Publiée dans le journal der Freymüthige, Berlin, 1803, page 62.
  3. Le comte Gotter. Cette lettre est relative à une Épître que Frédéric lui avait adressée.