Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome37.djvu/360

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tune. » Un autre m’envoie un paquet de rêveries ; il me mande qu’il a trouvé la pierre philosophale, et qu’il ne veut dire son secret qu’au roi. Je lui renvoie son paquet, et je lui mande que c’est le roi qui a la pierre philosophale. D’autres, qui vivaient avec moi dans la plus parfaite indifférence, me reprochent tendrement d’avoir quitté mes amis. Ma chère enfant, il n’y a que vos lettres qui me plaisent et qui me consolent : elles font le charme de ma vie.


2311. — À M. LE COMTE D’ARGENTAL[1].
25 décembre.

Ce n’est pas de Rome sauvée ni de Louis XIV qu’il s’agit ici, mon cher ange ; voici un petit mémoire que je vous supplie de donner et de recommander très-fortement à M. de Courteilles[2], votre ami. Il ne s’agit que d’un petit mot de recommandation de M. de Saint-Contest à milord Tyrconnell. Je me trouve dans le cas d’avoir presque forcé Mme  de Bentinck à prendre milord Tyrconnell pour son arbitre, conjointement avec le secrétaire d’État des affaires étrangères de Prusse. Elle aurait des reproches éternels à me faire si ces arbitres la sacrifiaient. Je présume qu’ils lui rendront justice, qu’ils ne prendront pas le parti du comte de Bentinck, dont la France et la Prusse doivent être également mécontentes, et j’attends tout de leur équité.

Je n’entre dans aucune discussion de l’affaire, je ne prétends pas que M. de Courteilles et M. de Saint-Contest soient fatigués de procédures impériales et danoises ; je demande simplement que M. de Saint-Contest écrive à milord Tyrconnell une lettre un peu pressante en faveur de la comtesse de Bentinck, sans entrer dans aucun détail. Mon cher ange, une lettre de recommandation est peu de chose. Le ministre, instruit de cette affaire, ne la refusera pas. Mais en faisant cette bonne œuvre, je vous supplie de ne me point nommer. Je ne veux me mêler que des affaires passées et point du tout des présentes.

Mandez-moi par la poste si vous avez reçu mon rogaton pour M. de Courteilles, et si on a fait ce que je vous conjure d’obtenir ; mais ne parlez dans votre lettre ni de Mme  de Bentinck, ni de son mémoire[3] ; il faut tâcher de ne pas s’exposer en rendant service.

  1. Éditeurs, de Cayrol et François.
  2. Conseiller au parlement.
  3. Elle plaidait contre son mari.