Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome37.djvu/437

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Maupertuis se rétablit difficilement, et va reprendre l’air natal. Pour moi, je suis trop malade pour voyager. Je suis tout accoutumé à mes souffrances ; et j’aime autant mourir à Potsdam qu’ailleurs.


..........Quod petis, hic est ;
Est Ulubris, animus si te non déficit æquus
[1].



Vous ne me dites rien de M. Duverney ; je ne doute pas, mon cher ami, que vous ne l’ayez retrouvé avec la même santé, la même amitié pour vous, prenant toujours à vous le même intérêt. Je vous ai prié, et je vous prie encore de lui faire mes compliments, aussi bien qu’à M. le marquis de Valori. Adieu ; goûtez les charmes brillants de Paris, et n’oubliez pas les plaisirs tranquilles de Potsdam.

Il n’est point du tout question ici de l’abbé de Prades.


2379. — À M. L’ABBÉ D’OLIVET.
Au château de Potsdam, le 25 mai.

Vous souvenez-vous encore de moi, mon cher confrère ? Voici un jeune homme que le roi de Prusse fait voyager pour étudier Cicéron et Démosthène. À qui dois-je mieux l’adresser qu’à vous ? C’est le fils d’un homme illustre dans la littérature, de M. de Beausobre, philosophe, quoique ministre protestant, auteur de l’excellente Histoire du Manichéisme, et le plus tolérant de tous les chrétiens. Le roi de Prusse, qui avait de l’estime pour ce savant homme, daigne servir de père au fils qu’il a laissé, et à qui il n’a rien laissé. Je le loge chez moi, à Paris ; c’est un devoir que m’impose la reconnaissance que je dois à un roi qui fait plus pour moi qu’aucun monarque n’a jamais fait pour aucun homme de lettres. Je n’ai ici d’autre chagrin que celui de n’avoir pas besoin des honneurs et des bienfaits dont le roi me comble. Vous voyez que mes peines sont légères. Voilà comme il faut sortir de France, et non pas comme votre ami Rousseau. Si vous pouvez rendre quelque service au jeune M. de Beausobre, en grec, en latin, ou en français, vous obligerez votre véritable serviteur, qui vous aimera toujours.

  1. Horace, livre I, épître xi, vers 29-30.