Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome37.djvu/90

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Je compte, dans quatre ou cinq jours, envoyer à Votre Majesté les véritables éditions que je fais faire.

Je vais aussi faire transcrire Catilina, ou plutôt Rome sauvée : car ce monstre de Catilina ne mérite pas d’être le héros d’une tragédie ; mais Cicéron mérite de l’être.

Voici, en attendant, la réponse[1] à votre objection grammaticale.

J’attends de votre plume d’autres présents, et je me flatte que la cargaison que vous recevrez de moi incessamment m’en attirera une de votre part. J’aurai l’honneur de faire ce petit commerce cet hiver ; et je crois, sire, sauf respect, que vous et moi nous sommes, dans l’Europe, les deux seuls négociants de cette espèce. Je viendrai ensuite revoir nos comptes, disserter, parler grammaire et poésie ; je vous apporterai la grammaire raisonnée de Mme  du Châtelet, et ce que je pourrai rassembler de son Virgile ; en un mot, je viendrai mes poches pleines, et je trouverai vos portefeuilles bien garnis. Je me fais de ces moments-là une idée délicieuse ; mais c’est à la condition expresse que vous daignerez m’aimer un peu, car sans cela je meurs à Paris.


2034. — À MADAME LA COMTESSE DE MONTREVEL[2].
Le 15 novembre.

Madame, permettez que je remette sous vos yeux le résultat de l’entretien que j’eus l’honneur d’avoir avec vous, il y a deux jours. M. le marquis du Châtelet se souvient que, de plus de quarante mille francs à lui prêtés pour bâtir Cirey et pour d’autres dépenses, je me restreignis à trente mille livres, en considération de sa fortune et de l’amitié dont il m’a toujours honoré ; que, de cette somme réduite à trente mille livres, il me passa une promesse de deux mille livres de rente viagère que lui dicta Bronod, notaire. Vous savez, madame, si j’ai jamais touché un sou de cette rente, si j’en ai rien demandé, et si même je n’ai pas donné quittance, plusieurs années de suite, étant assurément très-éloigné d’en exiger le payement.

Vous n’ignorez pas, madame, et M. du Chàtelet se souvient

  1. Voyez la lettre précédente, à d’Olivet.
  2. Florence du Châtelet, née le 4 avril 1704, mariée, en 1731, au comte de Montrevel (ou Mont-Revel), mort maréchal de camp le 13 janvier 1740. Cette dame était une des sœurs cadettes du marquis du Châtelet, et elle est appelée Monrevel dans la Correspondance de Grimm. (Cl.)