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année 1757.

bet : Attendez-moi sous l’orme. Portez-vous bien, madame ; vivez avec votre digne amie ; méprisez ce malheureux monde comme il le mérite ; conservez-moi vos bontés.

3334. — À M.  DUPONT,
avocat.
À Monrion, près de Lausanne, 10 mars.

Mon cher ami, les Cramer ont dû vous envoyer cette esquisse des sottises et des atrocités humaines depuis l’illustre brigand Charlemagne, surnommé le saint, jusqu’à nos ridicules jours. Plus je lis et plus je vois les hommes, plus je regrette votre société. Je vis pourtant dans le pays le plus libre et le plus tranquille de la terre, et où il y a de l’esprit et des talents. Si je vous disais qu’à Lausanne[1] nous avons joué Zaïre mieux qu’à la Comédie de Paris ; que nous jouons aujourd’hui l’Enfant prodigue ; que, dans peu de jours, nous représentons une pièce nouvelle[2] ; que nous avons un très-joli théâtre ; que notre société chante des opéras-buffa après la grande pièce ; qu’on donne des rafraîchissements à tous les spectateurs ; qu’ensuite on fait des soupers excellents, me croiriez-vous ? Cela n’est pas d’usage à Colmar ; mais en récompense vous avez des jésuites et des capucins. Soyez bien sûr que je vous regrette au milieu de tous nos plaisirs : ils étaient faits pour vous. Voulez-vous bien avoir la bonté de demander pour moi au libraire Schœpflin deux exemplaires des Annales de l’Empire ? Je vous serai très-obligé. Il n’aurait qu’à les faire remettre au coche à mon adresse, à Lausanne. Je lui en payerai le prix, ou je lui enverrai l’Essai sur l’Histoire générale, à son choix. Je vous serai très-obligé.

Mille respects, je vous en prie, à monsieur le premier président[3] et à madame la première. Mme Denis et moi, nous vous regrettons également ; nous vous aimerons toujours. Nous en disons autant à Mme Dupont.

  1. C’est-à-dire à Mon-Repos, à l’une des extrémités de Lausanne, sur la route de Vevai. Mon-Repos ou Mont-Repos, qui appartenait alors à la marquise de Gentil, a appartenu depuis à un ancien agent de change de Paris, M. Perdonnet, né à Vevai, qui en avait fait un séjour enchanteur. (Cl.)
  2. Zulime, remise à neuf, avec un autre titre.
  3. Le président de Klinglin, frère de Mme de Lutzelbourg.