Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome39.djvu/259

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mais vous savez avec quelle ardeur je le souhaitais. Vous irez peut-être à Berlin, et d’Argens viendra au-devant de vous.

Sérieusement, vous voilà chargé d’une opération aussi brillante qu’en ait jamais fait le maréchal de Villars. Je vous connais, vous ne traiterez pas mollement cette affaire-là ; et, soit que vous ayez en tête le duc de Cumberland, soit que vous vous adressiez au roi de Prusse, il est certain que vous agirez avec la plus grande vigueur. Je ne sais pas ce que c’est que la dernière victoire remportée sur le duc de Cumberland[1] ; j’ignore si c’est une grande bataille, si les ennemis avaient assez de forces, si les Anglais viennent ajouter quinze mille hommes aux Hanovriens ; mais ce que je sais, c’est que vous êtes dans la nécessité de faire quelque chose d’éclatant, et que vous le ferez.

Permettez que je vous parle du commissaire du roi pour les domaines des pays conquis : c’est un M.  de Laporte, qui sera sans doute chargé plus d’une fois de vos ordres. J’espère que vous en serez très-content. Vous le trouverez très-empressé à vous obéir. Je fais, dans ma retraite, mille vœux pour vos succès, pour votre gloire, pour votre retour triomphant.

Favori de Vénus, de Minerve, et de Mars, soyez aussi heureux que le souhaitent votre ancien courtisan le Suisse Voltaire et sa nièce.


3400. — À M.  L’ABBÉ D’OLIVET.
Aux Délices, 22 août.

Un Cramer, mon cher maître, m’a dit de vos nouvelles, que vous vous portiez mieux que jamais, que vous vous souvenez encore de moi, et que vous voulez que j’envoie mon maigre visage pour mettre à côté de votre grosse face. Tout cela est-il vrai ? et ma physionomie ne sera-t-elle point de contrebande ? Que faites-vous de tant de portraits ? Bientôt le Louvre ne les contiendra pas. Portez-vous bien et conservez-vous, voilà le grand point ; c’est peu de chose d’exister en peinture. Si j’avais un portrait de Cicéron, je l’encadrerais avec le vôtre. Mais pour moi, je ne serai tout au plus qu’avec Campistron ou Crébillon. Dites-moi, je vous prie, si, révérence parler, vous n’êtes pas notre doyen ? Il me semble que cette sublime dignité roule entre M.  le maréchal de Richelieu et vous.

J’ai bien une autre question à vous faire. Olivet n’est-il pas

  1. Voyez lettre 3367.