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CORRESPONDANCE.

zélé de ses partisans et le plus attaché de ses serviteurs ; vous ne trahirez ni votre conscience ni la mienne. J’espère beaucoup des ressources de son esprit. Toute notre destinée est entre les mains de deux abbés[1] ; Dieu bénira nos armes et nos négociations.


3591. — À M. LE BARON DE ZURLAUBEN.
Aux Délices, près de Genève.

Vous me donnez, monsieur, une extrême envie de vous obéir, mais vous ne pouvez me donner le talent de faire quelque chose d’heureux qui remplisse votre idée, et qui plaise au public et à vous. La langue française n’est guère propre aux inscriptions et aux épigraphes ; cependant, si vous en voulez souffrir une médiocre à la tête d’un bon livre, et au bas du portrait du duc de Rohian, en voici une que je hasarde, uniquement pour obéir à vos ordres. Puisqu’il s’agit du petit pays et de la petite guerre de la Valteline, ne trouvez pas mauvais que je trouve le théâtre petit ; c’est assez que votre héros ne le soit pas.


Sur un plus grand théâtre il aurait dû paraître ;
Il agit en héros, en sage il écrivit ;
Il fut même un grand homme en combattant son maître,
Et plus grand lorsqu’il le servit.


Vous voudriez, sans doute, de meilleurs vers, monsieur, et moi aussi ; mais il y a longtemps que j’ai renoncé à rimer. Une chose à laquelle je sens que je ne renoncerai jamais, c’est aux sentiments d’estime que je vous dois, et à l’envie de vous plaire. Pardonnez cette courte prose et ces plats vers à un pauvre malade.


3592. — À MADAME D’ÉPINAI.
Mars.

Vraiment, madame, vous me faites bien de l’honneur de croire que je suis assez sage pour inspirer la sagesse. Je serai seulement le témoin de celle de monsieur votre fils, de tout son mérite, et de son envie de vous plaire. Je vois bien qu’il vous a gâtée ; vous êtes si accoutumée à le voir au-dessus de son âge que quand il s’en rapproche vous êtes tout étonnée. Il vous a accoutumée à une perfection bien rare ; il vous a rendue diffi-

  1. L’abbé de Bernis et l’abbé de Clermont.