Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome39.djvu/45

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vu l’ouvrage adressé à une princesse, on a cru que cette princesse était une sœur[1] de …, et on l’a imprimé avec son nom. Je n’ai eu qu’à me taire, et je laisse les prêtres et les philosophes se battre.

Les Français et les Anglais doivent se battre, à présent, un peu plus sérieusement. M.  de Richelieu attaque à présent le Port-Mahon, et la flotte anglaise n’a pas encore paru pour le défendre. Si elle n’arrive que pour être témoin de la prise, l’Angleterre perdra son crédit dans l’Europe.

Il est toujours très-confirmé, par les lettres que je reçois de Buenos-Ayres, que les jésuites font, de leur côté, très-respectueusement la guerre au roi d’Espagne, et qu’ils empêchent les peuples du Paraguai de lui obéir.

Les mêmes lettres m’apprennent les détails inouïs de la destruction de Quito, au Pérou. C’est bien pis qu’à Lisbonne : la terre y a tremblé pendant trois mois. Le Tout est bien est un peu dérangé en Amérique, en Europe et en Afrique. Il se passe toujours des scènes sanglantes en Asie, tant en Perse que dans l’Indoustan. Jugez, madame, s’il est doux de vivre à Gotha.

On dit, à Genève, que Votre Altesse sérénissime pourrait bien y envoyer le prince son second fils, pour y faire quelque temps ses études. Que ne suis-je assez heureux pour que cette nouvelle soit vraie ! ou plutôt, que ne puis-je, dès à présent, venir faire la cour à la mère, et mettre à ses pieds un cœur qui sera toujours pénétré pour elle et pour toute son auguste famille du plus profond respect et du plus inviolable attachement !


3163. — DE STANISLAS,
roi de pologne.
À Lunéville, le 27 avril.

J’ai reçu, monsieur, avec un plaisir sensible votre lettre[2], que M.  le comte de Tressan m’a rendue. Je suis charmé de voir que dans votre retraite, qui pourrait faire croire que vous avez renoncé aux amorces du monde, vous vous souveniez de ceux qui ne vous oublieront jamais. Je ne saurais répondre à ce que vous me dites de plus flatteur que par vos propres idées. On peut envier en effet aux cantons que vous habitez la douceur dont ils jouissent par votre présence, et plaindre ceux qui en sont privés. Si vous m’attribuez le désir de rendre mes sujets heureux, soyez persuadé

  1. La margrave de Baireuth, sœur de Frédéric II.
  2. Sans doute celle dont il est question dans la lettre 3098.