Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome39.djvu/533

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
523
ANNÉE 1758.

que le sénat l’ait déposé ? Et le roi d’Espagne[1], a-t-il tout de bon perdu la raison ? Ma foi, le métier ne vaut plus rien. J’y renonce pour ma part, et vous prie de ne plus dire : Le royaume de Tournay. Parlons-en pourtant toujours autant qu’il vous plaira ; nous ne conclurons rien : n’importe, cela me servira de texte pour entretenir la conversation avec vous. Rien ne peut m’être plus agréable que ce commerce, à vos moments perdus ; et rien n’égale les sentiments que je vous ai voués. Ils sont tels que vous les méritez. Toute autre expression ne les rendrait que faiblement.


3684. — DE CHARLES-THÉODORE,
électeur palatin,
Manheim, ce 23 octobre.

Je vous suis bien obligé, monsieur, de la pièce que vous m’avez communiquée. Vous avez bien raison de dire que dans ce siècle il y a des choses qui ne ressemblent à rien, et beaucoup de riens qu’on voudrait faire ressembler à des choses. La seconde bataille des Russes est de ce nombre, et quantité d’autres. On a enfin surpris ce grand homme dans son camp[2] ; mais ses belles manœuvres ont tout rétabli. Il faut espérer que tant de sang versé fera penser à une paix qui est tant à désirer.

J’espère que votre santé sera entièrement rétablie, et que j’aurai, l’été qui vient, la même satisfaction dont j’ai si peu joui cette année. Soyez bien persuadé de la parfaite estime que j’aurai toute ma vie pour le petit Suisse.


Charles-Théodore, électeur.

3685. — À M.  TRONCHIN, DE LYON[3].
Délices, 23 octobre.

Je ne sais encore si je serai seigneur de Fernex ; on exige pour le droit goth et vandale des lods et ventes le quart du prix. Il faut, pour rafraîchissement, payer au roi le centième ; à la chambre des comptes, le cinquantième, etc. Ainsi, à fin de compte, on achèterait le double. Je tâcherai de m’arranger avec M.  de Boisy d’une façon moins ruineuse.

Je n’ai point de nouvelles depuis la victoire complète dans laquelle on n’a pas mis 400 hommes hors de combat, et depuis les 4,000 Anglais tués, lorsqu’il n’y en avait que 900 en bataille. L’hyperbole est une belle figure.

  1. Ferdinand VI, mort fou en 1759.
  2. La journée de Hochkirch (14 octobre 1758), où périrent le feld-maréchal Keith et le prince Maurice d’Anhalt, venait de coûter dix mille hommes à Frédéric. Ce fut à cette occasion que Clément XIII envoya à Daim une épée et une toque bénites. (Cl.)
  3. Éditeurs, de Cayrol et François.