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CORRESPONDANCE.

sont bien lourds. Tout nous dit que le siècle de Louis XIV était un étrange siècle. Vous, madame, qui êtes l’honneur du notre, conservez vos bontés pour l’habitant des Alpes qui connaît tout votre mérite, et qui est au nombre des étrangers vos admirateurs.

Mille amitiés, je vous en prie, à M.  du Boccage.

Mes nièces et moi, nous baisons humblement les feuilles de vos lauriers.


3734 — À M.  BERTRAND.
Aux Délices, 27 décembre.

Ma foi, mon cher ami, je vous avoue que je n’ai pas lu un seul de ces journaux italiens[1]. J’ai peu de moments à moi ; il y a autant de journaux que de gazettes. Les livres que je lis, en petit nombre, sont du temps passé ; et, pour le temps présent, je le mets à cultiver mes terres. D’ailleurs, il faut envoyer à Genève faire relier les feuilles ; les ouvriers font attendre, et le journal devient un almanach de l’année passée. Je crois que je dois un louis d’or. M.  Panchaud veut-il bien le donner pour moi, sur cette lettre ? je lui en tiendrai compte. Pardon, mille pardons ; mais je suis un peu surchargé de maçons, charpentiers, jardiniers, laboureurs. Ex nitido fit rusticus[2] ; mais entièrement à vous du fond de mon cœur.


3735. — À M.  LE CONSEILLER TRONCHIN[3].
Délices, 27 décembre.

On dit que Borde ou La Borde est brouillé avec Crésus-Montmartel. Dans quelle abbaye enverra-t-on Borde ? Qu’on remplisse la loterie, les rentes viagères, tant qu’on voudra : moi, je veux du blé, du bois, du vin, et des fourrages. Une terre reste ; tout autre bien peut être englouti ; je veux mourir laboureur et berger.


3736. — À M.  LE CONSEILLER TRONCHIN[4].
Délices, 28 décembre.

Le cardinal de Bernis a de quoi se consoler, s’il digère et s’il est philosophe. Tant d’exils ont l’air d’une plaisanterie ; mais ce qui n’est point plaisant, c’est l’épuisement de la France.

  1. Dont il parle dans sa lettre 3675.
  2. Horace, lib. I, ep. vii, v. 83.
  3. Editeurs, de Cayrol et François.
  4. Editeurs, de Cayrol et François.