Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome40.djvu/302

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
4038. — À MADAME D’EPINAI.
Aux Délices, 30 janvier.

Ce n’est point à ma chère et respectable philosophe que j’écris aujourd’hui, c’est à la femme d’un fermier général. Nous la supplions, Mme Denis et moi, de vouloir bien recommander le Mémoire ci-joint. Nous nous flattons d’obtenir au moins quelque satisfaction. Nous souhaiterions que MM. les fermiers généraux eussent la bonté de nous faire communiquer le tarif des droits qu’on doit payer pour ce qu’on fait venir de Genève au pays de Gex, avec injonction aux commis de ne point molester nos équipages, et de laisser passer librement nos effets de Tournay, territoire de France, à Ferney, territoire aussi de France. Quant au nommé de Crose[1], préposé par intérim au bureau de Saconex frontière, il ne paraît aucunement propre à cet emploi. La plupart des gardes sont des déserteurs ou gens de très-mauvaise conduite, qui font continuellement la contrebande. Ils ont dévasté nos forêts, et c’est là la véritable source de leurs vexations. Il paraît convenable que messieurs les fermiers généraux changent cette brigade. Presque tous mes gens de campagne sont des Suisses qu’il serait impossible de retenir. Ils prendront infailliblement querelle avec la brigade de Saconex, et je crains de très-grands malheurs.


4039. — À M. LE COMTE D’ARGENTAL[2].
Aux Délices, Ier février.

Mon divin ange, j’ai reconnu au moins cinq cents de mes enfants dans la famille royale de Prusse[3]. Nous verrons ce que diront les dévots de l’épître sur la mort du maréchal Keith[4] et de ce petit paragraphe honnête : Allez, lâches chrétiens. Maître Joly de Fleury assemblera-t-il les chambres pour faire brûler le roi de Prusse ? Je ne crois pas qu’il l’ose, car, après tout, deux ou trois Piosbachs mèneraient l’auteur à Paris, et maître Joly passe-

  1. Je ne sais si c’est le même personnage qui est appelé Rose dans la Requête Au Roi, de novembre 1776 (voyez les Mélanges), et dans les lettres à Mme de Saint-Julien, du 5 décembre 1776, et à M. de Trudaine, du 10 du même mois. (B.)
  2. Éditeurs, de Cayrol et François.
  3. C’est-à-dire cinq cents vers de moi dans les Poésies du philosophe de Sans-Souci. (G. A.)
  4. Êpître au maréchal Keith, imitation du livre III de Lucrèce sur les vaines terreurs de la mort et les frayeurs d’une autre vie.