Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome40.djvu/391

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Je ne connais que légèrement Helvétius ; mais je ne puis m’empêcher d’être indigné de la barbarie avec laquelle on le traite. À l’égard de Saurin je le vois plus souvent ; c’est un homme d’un esprit plus juste que chaud ; sa pièce de Spartacus a, ce me semble, de beaux endroits.

J’ignore absolument quel sera le sort de l’Encyclopédie. J’ai donné presque entièrement aux libraires ma partie mathématique, à l’exception des deux dernières lettres ; du reste, je ne me mêle et ne me mêlerai de rien. On grave actuellement les planches qu’apparemment la Sorbonne et le parlement ne condamneront pas, et dont on aura un volume cette année. Voilà, mon cher philosophe, le triste état de la philosophie, que milord Shaftesbury appellerait bien aujourd’hui poor lady. Vous voyez combien elle est malade ; elle n’a de recours qu’en vous ; elle attend avec impatience et avec confiance ce que vous voudrez bien faire pour elle. Je vous embrasse de tout mon cœur.


4117. — À M. LEKAIN.

Mon cher et grand acteur, quand vous pourrez venir introduire un peu de bon goût à Lyon et à Dijon, vous me ferez un extrême plaisir de ne pas oublier les Délices et le château de Tournay, où vous trouverez un théâtre grand comme la main, mais où l’on admirera vos talents tout aussi bien que sur un plus grand. Vous avez, dit-on, envie de jouer la Mort de César et celle de Socrate. Socrate ne passera point, et César, sans femmes, ne peut être joué que chez des jésuites. Cependant, si on le veut absolument, il faudra s’y prêter, à condition que l’auteur de Socrate le rende plus susceptible du théâtre de Paris.

Il vaudrait beaucoup mieux jouer Rome sauvée ; cela formerait un beau spectacle sur un théâtre purgé de petits-maîtres. Il arriverait peut-être à Rome sauvée la même chose qu’à Sémiramis : elle n’a réussi que quand la scène a été libre.

Je fais bien peu de cas de Médime ; le présent est médiocre, mais je fais un cas infini de vous.


4118. — À M. LACOMBE[1],
à paris.
Aux Délices, 9 mai.

Je recevrai, monsieur, avec une extrême reconnaissance l’ouvrage dont vous voulez bien m’honorer. Votre lettre me donne

  1. Jacques Lacombe, né à Paris en 1724, avocat, reçu libraire en 1766, mort le 16 septembre 1801, auteur de l’Histoire des révolutions de l’empire de Russie, 1760, in-12, etc.