Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome40.djvu/511

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n’en croissait qu’un rend plus de services à l’État qu’un poêle et même qu’un faiseur de feuilles,

Il remercie humblement, vivement et tendrement, M. Chauvelin de ses bontés. Il a glorieusement fini son affaire avec le roi, et lui a cédé noblement la seigneurie de la Perrière malgré les souterrains du président de Brosses, et malgré ses fétiches : car le président a fait un livre touchant les fétiches, et s’il m’échauffe les oreilles, je pourrai en informer le public. Je suis devenu un petit noli-me-tangere tout à fait mutin.

Au reste, j’ignore comment on sauvera mon Pondichéry, comment on trouvera de l’argent pour l’an de grâce 1761, comment on trouvera dans mon pays de Gex des bras pour cultiver la terre. J’ai deux lieues à cultiver. Je suis citoyen à raison de deux lieues, et je suis tout aussi embarrassé à trouver des laboureurs que M. Berryer[1] à trouver des flottes. Je plains tendrement ma chère patrie ; mais ma chère patrie a fait tant de sottises que je lève les yeux au ciel quand tout le monde lève les épaules.

Je supplie M. l’abbé de Chauvelin[2] de considérer que toutes les remontrances du monde ne serviront pas à nous donner de l’argent, des vaisseaux, et des lieutenants généraux, dont nous avons besoin.

Je présente mes tendres respects à M. de Chauvelin et à monsieur l’abbé.


4222. — À M. DUCLOS.
11 août.

Je sais depuis longtemps, monsieur, que vous avez autant de noblesse dans le cœur que de justesse dans l’esprit ; vous m’en donnez aujourd’hui de nouvelles preuves. Je ne doute pas que vous ne veniez à bout d’introduire M. Diderot dans l’Académie française, si vous entreprenez cette affaire délicate ; je vois que vous la croyez nécessaire aux lettres et à la philosophie dans les circonstances présentes. Pour peu que M. Diderot vous seconde par quelques démarches sages et mesurées auprès de ceux qui pourraient lui nuire, vous réussirez auprès des personnes qui peuvent le servir. Vous êtes à portée, je crois, d’en parler à Mme de Pompadour ; et, quand une fois elle aura fait agréer au roi l’admission de M. Diderot, j’ose croire que personne ne sera

  1. Ministre de la marine.
  2. Conseiller au parlement.