M. Prault doit savoir que le volume à lui envoyé par les frères Cramer est une chose très-délicate, qu’il ne faut ni demander une permission, ni mettre mon nom à la tête du livre, ni la première lettre de mon nom ; que le libraire risquerait beaucoup ; que je n’avoue aucune des pièces que ce livre contient, et que je les désavoue presque toutes. En un mot, je le prie très-instamment d’ôter : par M. de V., qu’on a mis très-imprudemment. M. Prault y a un intérêt sensible. Il n’y a qu’à substituer au titre : Nouveau volume pour joindre aux autres, et rien de plus.
J’attends la tragédie de Tancrède. Comment a-t-il pu s’imaginer que je donne Tancrède à d’autres, en même temps qu’à lui ?
Vous vous êtes blessé avec vos armes, mon cher et ancien ami ; il n’y a qu’à ne vous plus battre, et vous serez guéri. Dissipation, régime, et sagesse, voilà vos remèdes. Je vous proposerais Tronchin, si je me flattais que vous daignassiez venir dans nos petits royaumes ; mais vous préférez les bords de la Seine au beau bassin de nos Alpes. Je m’intéresse beaucoup teretibus suris[3] de notre grand abbé[4]. Vous êtes de jeunes gens en comparaison du vieillard des Alpes. Il ne tient qu’à vous de vous porter mieux que moi. Je suis né faible, j’ai vécu languissant ; j’acquiers dans mes retraites de la force, et même un peu d’imagination. On ne meurt point ici. Nous avons une femme d’esprit[5] de cent trois ans, que j’aurais mariée à Fontenelle s’il n’était pas mort jeune.
Nous avons aussi l’héritière du nom de Corneille, et ses dix-sept ans. Vous savez qu’elle a l’esprit très-naturel, et que c’est pour cela que Fontenelle l’avait déshéritée[6]. Vous savez toutes mes marches. Il est vrai que j’ai fait rendre le bien que les jésuites