Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome41.djvu/242

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

quinze jours entre la vie et la mort ; et l’honnête curé qui l’avait mis en cet état m’a soutenu que c’était un érésypèle ; je ne crois pas qu’il y ait dans l’Église un plus impudent coquin que ce prêtre. Aussi l’évêque savoyard prend vigoureusement son parti. Avez-vous lu le roman de Rousseau J.-J.[1] ? Cela ne me paraît ni dans le goût de Tèlémaque, ni dans celui de Zaïde. J’aurai l’honneur de vous envoyer par la poste des exemplaires du rogaton que vous me demandez[2] par l’adresse que vous m’indiquez.

Mille respects à Mme de Ruffey, comme à vous.


4486. — À M. PIERRE ROUSSEAU[3].
Au château de Ferney, pays de Gex, 10 mars 1761.

La personne en question a reçu le paquet du 4 mars. Il faut qu’on ait envoyé à Bouillon une copie défigurée. Voici ce que porte l’original que nous avons sous les yeux :


Au camp du roi les prêtres le portèrent
Et de leurs pleurs les chemins arrosèrent.
Paul Tirconel, homme en tout violent,
Prenait toujours son parti promptement.
Il détesta depuis cette aventure,
Et femme, et fille, et toute la nature.
Il monte un barbe, et courant, sans valets,
L’œil morne et sombre, et ne parlant jamais,
Le cœur rongé, va dans son humeur noire
Droit a Paris, loin des rives de Loire.
En peu de jours il arrive à Calais, etc.


Le manuscrit que nous avons est de l’année 1740, et nous le croyons écrit de la propre main de l’auteur, quel qu’il soit.

On a vu une Ode sur la guerre dans le Recueil III ; cette ode est quatre fois trop longue, et pleine de fautes contre la langue. Elle est d’un étranger qui a beaucoup d’esprit.

On est ici entièrement de l’avis de l’auteur du Journal encyclopédique sur la Nouvelle Héloïse. On la regarde comme un mélange monstrueux de débauche et de lieux communs de morale, sans

  1. La Nouvelle Héloïse.
  2. La Lettre à un sénateur bolonais (le marquis Albergati Capacelli).
  3. Bibliothèque royale de Belgique, mst 11583. Communiquée par M. F. Brunetière.