Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome41.djvu/244

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

goût de cet amusement ! Mais on ne se donne rien. Si vous n’êtes pas née jardinière, vous ne le serez jamais.


4488. — À M.  DE CHENEVIÈRES[1].
À Ferney, 14 mars[2].

Je ne vous ai point remercié, mon cher ami, de toutes vos attentions ; nous avons été occupés à jouer la comédie ; il a fallu faire le théâtre, la pièce et les acteurs. J’en excepte Mme  Denis, que sa nature a faite une excellente actrice. Mlle  Corneille l’est devenue. Je ne m’étais pas attendu qu’elle développerait un talent si marqué. Elle dit des vers comme son oncle les faisait. Nous avons un théâtre digne d’elle, mieux entendu, mieux orné, plus éclairé que celui de Paris ; et, ce qui est fort extraordinaire, nous avons un auditoire composé de très-bons juges. Il y a beaucoup d’esprit dans l’enceinte de nos montagnes, et point de cabales ; on ne vient à notre spectacle que pour avoir du plaisir. Que ne pouvons-nous jouir de celui de vous y voir ! Je vous embrasse.


4489. — À M.  FABRY[3].

Je suis tout prêt sans doute, mon cher monsieur, à tirer la commune de Fernex ou Ferney du bourbier où le chicaneur Budée de Montréal l’avait plongée ; et, quoiqu’il me reste très-peu d’argent, attendu qu’on me pille de tous côtés, cependant je payerai volontiers pour ces malheureux.

J’ai passé l’acte dans cette vue, mais suivant le bon plaisir de monsieur l’intendant. Il faut donc qu’il réforme son bon plaisir ; il faut donc qu’ayant ordonné que tout le village se cotise il ordonne à présent que les communiers empruntent. Je laisse à vos soins, à votre prudence et à vos bontés, l’arrangement de cette petite affaire. Tout ce que vous déterminerez sera bien fait. Vous êtes accoutumé à débrouiller des choses plus difficiles, et vous mettez partout de la facilité et de la justice. Quand vous voudrez me communiquer vos idées et vos ordres sur le très-inculte et très-misérable pays de Gex, je tâcherai de marcher à votre suite.

J’ai l’honneur d’être, avec tous les sentiments d’estime et de confiance qu’on vous doit, monsieur, votre très-humble et très-obéissant serviteur.

  1. Éditeurs, de Cayrol et François.
  2. Cette lettre est de 1761, et non de 1763.
  3. Éditeurs, Bavoux et François.