Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome41.djvu/429

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tenir ? Tronchin est le premier homme du monde pour ces maux-là. Le duc de Villars est venu porter sa misère aux Délices : on disait qu’il y mourrait ; il se porte bien au bout de quinze jours. L’abbé d’Héricourt, gourmand de la grand’chambre, s’est tué pour s’être baigné les jambes dans le lac, avec une indigestion ; mais les gens sages vivent.

Je prévois que vous viendrez aux Délices, et que je serai le plus heureux des hommes ; oui, mes anges, vous y viendrez.

Vous devez à présent savoir à quoi vous en tenir sur Pierre et Marie Corneille. Je me donnerai bien de garde de faire imprimer un programme avant d’avoir fait ma recrue de têtes couronnées ; et quant aux particuliers, c’est à prendre ou à laisser. Je ne me mêlerai que de bien travailler.

Ceux qui chipotent et qui s’en vont disant : « L’aurons-nous in-4°, l’aurons-nous in-8° ? aurons-nous pour deux louis huit ou dix volumes (avec trente-trois estampes) qui coûteraient dix louis, et qui ne pourraient paraître que dans trois ans ? » sont de plaisantes gens ; mais c’est l’affaire des Cramer, et non la mienne : je ne me charge que de me tuer de travail, et de souscrire.

J’ai découvert enfin qui est l’auteur du Droit du Seigneur, ou l’Écueil du Sage ; c’est M.  Legouz[1], jeune maître des comptes de Dijon, et de plus académicien de Dijon. Il est bon de fixer le public par un nom, de peur que le mien ne vienne sur la langue. Vous êtes charmant, continuez la mascarade.

Divins anges, tout ce que vous me dites de la Compagnie indienne est bol et bon ; mais il est dur de vendre sept cents francs ce qu’on a acheté quatorze cents. Voilà le nœud, voilà le mal, et ce mal n’est pas le seul.

Comme j’ai aujourd’hui quinze lettres[2] à écrire, et Pertharite à achever, je m’arrache au doux plaisir d’écrire à mes anges, et je finis en remerciant M.  le comte de Choiseul pour la dame du Fresnoy, qui est grosse comme la tonne d’Heidelberg.

Est-il vrai que frère Menou soit condamné aux galères par le parlement de Nancy ? Cela serait curieux ; mais il y a peu de ports de mer en Lorraine.

Voilà donc monsieur l’abbé[3] coadjuteur grand-chambrier. Les jésuites lui doivent un compliment.

Mille tendres respects.

  1. Voyez page 416.
  2. De ces quinze lettres on n’en a que quatre ou cinq, en y comptant celle à d’Alembert, dont il a été parlé page 417.
  3. De Chauvelin.